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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 22:08

 

 

 

 

 

 

 

Avec le retour aux affaires du Parti Socialiste (nooooon, ce n’est pas une fine allusion à M. Guérini…) et la nomination sans surprise de Vincent Peillon à l’Education Nationale, on ne doit s’étonner ni de voir réapparaître au ministère quelques têtes connues comme  MM. Duwoye, Siné et Delahaye, (sans oublier, naturellement, M. Jean-Jacques Hazan, parent d’élève professionnel, et l’immarcescible Bruno Julliard), ni de réentendre des fadaises que cinq années de dékhonnage à droite-droite nous avaient quelque peu fait oublier.

 

Changer de gouvernement, serait-ce donc juste changer de bêtise, comme on dit changer d’air, de coiffure ou de chemise ?

 

On peut se le demander quand on entend le ministre, manifestement cornaqué de très près par le SGEN-CFDT, l’UNSA-FEN et la FCPE, annoncer à grands sons de trompe devant les parents d’élèves de la PEEP qu’il a l’intention de « faire évoluer la notation » , -- ce qui, ô surprise, a immédiatement été compris par tous les thuriféraires de l’élève au centre et du système finlandais, comme la fin pure et simple de la notation. Emporté par son élan, après avoir à plusieurs reprises souligné la grande souffrance des écoliers français, V. Peillon a affirmé au congrès de la FCPE vouloir être « le ministre des élèves ». C’est beau comme l’Antique.

 

Loin de moi l’idée de me lancer dans des jeux de mots fâcheux sur le lycée Papeillon, ni même d’entonner le grand air indigné du laxisme à l’école : si les moyennes désastreuses et les zéros pointés permettaient de faire progresser les potaches, cela se saurait. Il ne s’agit donc pas pour moi de défendre les notes pour le plaisir de défendre les notes, mais simplement d’essayer, si c’est possible, de poser les problèmes de manière sérieuse.

 

Qu’il ne soit pas agréable de « se prendre une taule » (une bulle, une caisse, une pêche, une moque…), surtout quand on a l’impression d’avoir sérieusement travaillé, personne ne le contestera. De là à parler d’enfants aussi traumatisés que les petits Japonais (qui, rappelons-le, en viennent parfois à se suicider tant ils sont sous pression), il y a tout de même un pas qu’il faut éviter de franchir sauf à oublier ce que parler veut  dire. Répétons-le , nos collègues sont des professionnels de l’enseignement, pas une bande de sadiques aigris qui se défoulent de leur mal-être existentiel en « sacquant » les chères têtes blondes, brunes et rousses. Tout se passe comme si, de fait, c’étaient surtout les parents qui étaient en souffrance – la fonction de géniteur d’apprenant suscitant, on peut le croire, une teneur en stress nettement supérieure à  la moyenne. Les surrénales, sans doute…

 

Donc, sérieusement : on va supprimer la notation, au moment précis où tous les défenseurs de l’évaluation se retrouvent aux manettes. Certes, il ne s’agira pas de l’évaluation de droite, qui, air connu,  n’est pas bonne, mais de celle de gauche -- celle qui, j’ignore par quel miracle, se trouvera soudain parée de toutes les vertus pédagogiques. L’évaluation, on le sait, est le maître-mot du « socle commun », dont le livret de compétences est dorénavant à remplir pour la première fois de manière nationale en troisième.

Rappelons à ceux qui ont loupé un épisode du feuilleton que ce livret est censé évaluer non seulement des compétences disciplinaires, mais aussi des « savoir-être », en clair des comportements, comme par exemple, dans les « compétences sociales et civiques », « mobiliser ses connaissances pour comprendre quelques questions liées à l’environnement et au développement durable et agir en conséquence » « prendre conscience des enjeux citoyens de l’usage de l’informatique et de l’internet », « s’impliquer dans un projet individuel ou collectif », « participer à un débat, à un échange verbal », connaître le « rôle de la défense nationale », « se familiariser avec l’environnement économique, les entreprises, les métiers de secteurs et de niveaux de qualification variés », « s’engager dans un projet individuel, s’intégrer et coopérer dans un projet collectif, manifester curiosité, créativité, motivation à travers des activités conduites ou reconnues par l’établissement, assumer des rôles, prendre des initiatives et des décisions », sans oublier les « attestations scolaires de sécurité routière », « « apprendre à porter secours » , et j’en passe.

Bref et si j’ai bien compris, pour valider tous ces items, l’élève Kevin Dugenou devra trier ses déchets, ne pas aller zyeuter des cochoncetés sur internet, participer au club Unesco, jouer le jeu du débat citoyennisant, saluer les couleurs, lire les cours de la Bourse, être délégué de classe, et traverser dans les clous : bref, le rejeton de la famille Ricoré, que dis-je, un véritable amour d’enfant, parfaitement conforme aux canons de la bien-pensance en cour !

 

Que l’on me permette de préférer la brave et honnête « composition », qui, par la notation,  n’évaluait QUE la capacité de l’élève, au moment M, d’accomplir la tâche T, qu’il s’agisse de l’accord du participe passé, de la règle de trois ou du pluriel des noms en –ou. L’évaluation par compétences, parfaitement intrusive, aurait dû, en bonne logique, horrifier des parents d’élèves pourtant si soucieux de l’épanouissement de leur géniale progéniture bien peignée. Manifestement, quelque chose leur a échappé – et je parie volontiers que dans quelques années, si ce type d’évaluation comportementale  se généralise dans tout ce qu’elle a de normatif, ces mêmes parents demanderont avec véhémence le rétablissement de la notation.

 

Alors, soyons encore sérieux cinq petites minutes : renoncer aux notes, c’est juste un gadget, qui a principalement l’avantage de ne pas coûter un sou. Au lieu de supprimer la notation, mesure aussi stupide qu’inutile, le ministre et son équipe s’honoreraient de remettre de l’Ecole à l’école, afin de venir en aide à tous ceux qui n’ont, justement, que l’Ecole pour apprendre.

 

V. Peillon n’a pas à être le ministre des élèves, ni le ministre des parents, ni le ministre des enseignants, ni même le ministre de l’éducation, mais le ministre de l’instruction publique, -- et c’est à ce DEVOIR D’INSTRUCTION PUBLIQUE que Reconstruire l’Ecole, opiniâtrement, obstinément  et sans rien lâcher, le rappellera.

 

 

 ... et toujours, le site de RECONSTRUIRE L'ECOLE, http://www.r-lecole.fr/

 

 

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commentaires

L
<br /> J'approuve complètement votre billet, madame la Présidente. Les notes ne sont pas parfaites, mais elles permettent au moins à l'élève de s'orienter et d'avoir une idée de son niveau.<br />
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L
<br /> <br /> Nous sommes d'accord. Il ne s'agit pas d'humilier les élèves, mais de faire en sorte qu'ils puissent avoir une véritable idée de leur niveau. Quant à l'orientation, à partir du moment où le<br /> rapport Refondation décide que le dernier mot ira aux parents... on voit bien qu'ipso facto il ne sert plus à rien de noter. CQFD :<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> La suppression des notes... et la suppression des devoirs, avant la suppression totale et définitive du professeur, des écoles ou d'ailleurs... Antibi revient hanter l'esprit pédagogiquement<br /> vasouillard de la gauche molle. Il va falloir se mobiliser ferme !!!<br />
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L
<br /> <br /> Oui, se mobiliser ferme, et pas seulement sur une posture défensive (préserver l'existant, qui n'est pas satisfaisant en l'état, tant s'en faut). Reconstruire l'Ecole, c'est un devoir<br /> d'instruction publique, à destination, prioritairement,  de l'élève qui n'a que l'Ecole pour apprendre : donc c'est remettre de l'école à l'Ecole, et non, comme vous le dites fort bien,<br /> vasouiller pédagogiquement ! <br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> Madame la Présidente, vos billets me plaisent toujours autant, mais il y a un problème dans votre compteur de commentaires.<br /> <br /> <br /> Il en annonçait 20, il n'y en avait que 2 (sur 20) : dans ces conditions, comment être crédible sur la notation ?<br />
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L
<br /> <br /> Très juste. Comme disait l'oncle atomicien de Boris Vian, "Y'a kekchose qui loupe là-d'sans, j'y retourne immédiat'ment..."<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Il fallait le dire et c'est très bien dit.<br /> <br /> <br /> Le sgenunsa, déjà en pleine reptation courtisane, s'essaie maintenant aux contorsions gymnosophistes pour "réformer" le livret compétentiel - usine à gaz délirante dans la forme et délétère sur<br /> le fond, qu'il sait très contesté -  sans rien y toucher.<br /> <br /> <br /> La généralisation au lycée sera un peu plus compliquée mais les nouveaux programmes de terminale qui vont entrer en langueur dès septembre sont calibrés pour y mener.<br />
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L
<br /> Pas de doute, il faut supprimer la note et les classements : c'est ce qui ressort de la note de la France dans les classements des systèmes éducatifs. <br /> <br /> <br /> Merci, Madame la Présidente, pour cette belle tribune qui va éclairer ma journée morose.<br /> <br /> <br />  <br />
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