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14 octobre 2012 7 14 /10 /octobre /2012 17:51

 

 

 

 

 

« Ou la maladie vous tuera, ou ce sera le médecin… »


  Refondation, suite.


 

La troisième partie du rapport, intitulée « Des personnels formés et reconnus », pose plus de problèmes qu’elle n’en résout, en dépit de l’affirmation des « éléments de large consensus » qu’aurait fait apparaître sur ce sujet la Grrrrrande Concertation.


Je veux bien que «  l’intégration de la formation des maîtres à l’université (soit) désormais acquise » (p. 44), et que le « niveau de recrutement au master (soit) également accepté » (ibid.), alors même que tout ceci ne va pas de soi pour toutes sortes de raisons sur lesquelles on reviendra (voir par exemple, sur le site de l’association, le texte de P. Cordoba

http://www.r-lecole.fr/iufm/place_concours_pc_2012.html ).


Le principe même d’un pré-recrutement au niveau licence n’est pas inintéressant a priori – après tout, notre génération de baby-boomers a largement bénéficié des IPES, jadis obtenus soit par concours en première année soit par admissibilité à l’ENS à bac +2, et qui ont constitué pendant longtemps un véritable vivier de professeurs. On peut toutefois s’inquiéter, sans renseignement précis sur les modalités et critères de ces nouveaux IPES, quant au niveau de connaissances disciplinaires chez les futurs pré-recrutés. Peut-il y avoir des concours de type IPES si ces « pré-recrutements » ont lieu sur critères sociaux ?  En outre,  s’agira-t-il de véritables pré-recrutements s’il n’y a ni traitement, ni droits sociaux, ni droit à la retraite, mais juste une indemnité d’environ 400 € s’ajoutant à la bourse jusqu’à concurrence de 900 € maxi si l’ensemble des bourses (il y en a généralement deux dont une locale) fait 500 € ? Cela ne ressemble en rien aux anciens IPES, --  à la rigueur à un poste de pion puisque les bénéficiaires de ces « nouveaux emplois-jeunes » devront s’occuper de surveillances, d’aide aux devoirs, etc. (voir sur le blog de Cl. Lelièvre l’intervention de P. Cordoba :

http://blog.educpros.fr/claudelelievre/2012/08/24/prerecrutements-18000-emplois-davenir-professeur/#comment-1352 )

Il semble que les services de V. Peillon soient conscients du fait que ces 6000 nouveaux « pions » n’ont aucune chance de réussir un concours (ce fut le cas déjà des emplois-jeunes dans l’Educ nat). La solution qui semble se profiler est celle d’un concours parallèle qui leur permettrait d’être titularisés sans avoir à se mesurer aux candidats « normaux ». Encore faut-ils qu’ils réussissent la licence, ce qui est rien moins qu’évident. La CDIUFM demande qu’on « garantisse leur parcours ». Si je comprends bien, cela signifierait que leur formation reviendrait aux ESPE : ils échapperaient ainsi à la fois aux concours et aux universités, y compris pour la licence. Quelle panade… Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, comme disait ma grand-mère ?

 

… Bref, bienvenue donc aux ESPE, « les nouvelles Ecoles Supérieures du Professorat et de l’Education », qui devront être « des composantes de l’université », et dont on ESPEre (désolée, je résiste à tout, sauf à la tentation, comme l’avouait Oscar Wilde) d’abord et surtout qu’elles ne reproduiront pas à l’identique les errements pédagonigologiques des défunts IUFM auxquels elles vont succéder. La suite du rapport donne en effet, on va le montrer, largement matière à s’inquiéter.

 

Car la première question qui se pose est celle de la professionnalisation, et elle est majeure. Enseigner, c’est « un métier qui s’apprend » (p. 44), ce que personne ne contestera, même ceux qui considèrent que c’est aussi un art : après tout, pas d’art sans technique, et comme le chantait Brassens, « sans technique un don n'est rien qu'une sale manie ».

Mais tout dépend de la manière dont  ce métier s’apprend.

Le rapport nous rappelle en préliminaire que la « vocation professionnalisante » de la formation initiale « doit être affirmée », formation « (devant) marcher sur ses deux jambes, académique et pédagogique » (p. 44 toujours). L’image se veut rassurante : qui serait donc assez sot pour rêver d’enseignants professionnellement boiteux, soit de vrais savants Cosinus incapables de produire un cours qui se tienne, soit de purs pédagogues ignorantins ? Chacun sait que ces deux extrêmes n’existent que rarement, à quelques exceptions près que ma bienveillance naturelle seule m’interdit de citer …

 Il n’empêche que, dans les faits, on peut se poser des questions, non seulement sur les contenus de cette formation initiale, mais encore sur le dosage entre l’académique et le pédagogique. Ne nous racontons pas d’histoires : le « niveau de recrutement au master », quoi qu’on en dise, ne signifie en aucune façon que l’étudiant est convenablement armé sur le plan académique. La preuve : si pour la première fois depuis très longtemps, les jurys de CAPES ont laissé de nombreux postes vacants, c’est parce que les candidats pourtant titulaires d’un master, ou du moins inscrits en M2, n’avaient pas les connaissances disciplinaires suffisantes. Et il suffira désormais d’être inscrit en M1 pro avec un écrit en novembre après la licence (septembre pour les professeurs des écoles) !

Or un étudiant a encore beaucoup à apprendre à ce niveau-là, qu’il se destine à enseigner dans le second degré ou en primaire, et,  même si je me place d’un point de vue pédago,  je vois mal comment on peut travailler convenablement la didactique d’une discipline que l’on ne maîtrise pas ou pas bien.

Or, cette formation initiale « intègr(e) le concours », ce qui  m’interpelle très fort : comment ne pas être saisie de lugubres pressentiments en lisant p.45 qu’on devra « s’attacher à ce que le concours de recrutement, où qu’il se situe  (note de la Pdte : niveau master, non ???? à moins qu’il ne s’agisse des pré-recrutements en licence ?) permette d’identifier, au-delà de la mesure des compétences disciplinaires, les qualités nécessaires au métier ainsi que les premiers éléments d’une professionnalisation » ?  

 

Quand je lis en haut de la p. 45 qu’il faut « assurer la simultanéité de la formation académique et professionnelle dès la licence » (c’est moi qui souligne) et « mettre le principe de l’alternance au cœur de la formation des personnels » (ibid.), je sursaute : si je comprends bien, il est dorénavant acquis que c’est avant même le concours que prendra place la formation professionnelle en alternance, comme si l’on imposait aux étudiants de PCEM1 des stages hospitaliers afin de vérifier s’ils sont capables de poser un cathéter ou de suturer une plaie. Je plains les patients, qui n’auront jamais aussi bien porté leur nom !

L’idée des ESPE est que la formation  doit se faire « en alternance » par des modules de professionnalisation en amont (licence) et tout au long du master. L’objectif est de détruire le système « successif » (d’abord la discipline puis la didactique, si didactique il doit y avoir) au profit d’un système « intégré » comme dans les « educational schools » aux Etats-Unis, où l’on n’étudie pas l’histoire ou les mathématiques mais « l’histoire pour l’éducation » ou les « mathématiques pour l’éducation », c'est-à-dire des disciplines déjà didactisées.

 

 

Je sais bien que, dans un contexte d’austérité,  l’Education Nationale, même après avoir créé  40.000 postes d’ici 2014, a encore grand besoin de main-d’œuvre bon marché pour ne pas dire gratuite… mais quand même, quand même… S’agira-t-il de stages en observation, ce que l’on pourrait  à la rigueur admettre, ou d’une immersion (avec tuteur, ou en responsabilité ?) au cours de laquelle on ne voit plus bien qui servirait de cobaye à qui ? La seule explication logique à tout cela, serait la mise en place de licences pro, avant même les fameux masters pro  qui ont fait tellement couler d’encre à RE et ailleurs (voir par exemple, sur le site de l’association, l’article de Pedro Cordoba déjà référencé supra). Mais dans ce cas, il faudrait l’expliquer plus clairement – et nous montrer, par la même occasion, ce que l’on a prévu pour les recalés aux concours qui, avec leur licence et leur master pros, n’auront plus qu’à tenter leur chance comme vacataires avec juste leurs yeux pour pleurer sur leur précarité.

A moins que cette licence et ce master pros ne leur offrent, par un système d’équivalences ou de VAE, de vrais débouchés dans les carrières de l’animation culturelle, de l’accompagnement et du soutien scolaire, de la petite enfance, de l’intégration, du handicap … Mais là encore, il faudrait le dire nettement et ne pas prendre le risque, au nom d’une conception pour le moins discutable de la professionnalisation et de l’alternance, de jeter dans l’impasse des milliers de jeunes gens, d’autant qu’il y a déjà des écoles de formation spécialisées dans tous ces domaines. Et de toute façon il n’y a pas cinq ou six fois plus d’emplois dans le parascolaire que dans l’enseignement.

 

En fait, ce qui semble se mettre en place, dans la logique de ces propositions, c’est un système susceptible de reproduire, des défunts IUFM, tous les défauts et toutes les aberrations, -- avec en particulier l’omnipotente omniprésence des sciences-sic de l’éducation, même si le rapport essaie d’avancer plus ou moins  masqué.

 

 Certes, on admet (p. 44)  l’importance de « reconnaître la diversité des métiers (…) donc des exigences et des cursus au sein des formations », et on entend restreindre le « curriculum commun » aux grands principes de l’Ecole républicaine, « laïcité, éthique professionnelle », « connaissance de l’Ecole et du système éducatif, des territoires et des partenaires, rôle des collectivités, relations éducation/emploi, lutte contre les stéréotypes liés aux genres » (ibid), toutes choses sur lesquelles, en bons humanistes que nous sommes,  nous  tomberons à peu près d’accord, -- et même, à la rigueur, sur « (l’intégration) à la formation (d’) un enseignement de sciences humaines et sociales » (p. 44 encore) pour les professeurs : comme disait un vieux médecin de mes amis à propos des cataplasmes lin-moutarde,  c’est pas nocif, en tout cas pas plus que d’intégrer la dimension des « usages pédagogiques du numérique (…) aux concours de recrutement » (p. 47) ;-(

A propos de l’« éthique professionnelle », néanmoins, il serait pertinent de demander s’il est envisagé en haut lieu de pérenniser, à l’oral des concours, la fameuse épreuve de servilité dite « agir en fonctionnaire éthique et responsable » (cf., toujours sur le site de RE, désolée de me citer, http://www.r-lecole.fr/fguichardmais05.htm ),  dont les Olympiens qui nous gouvernent se feraient un honneur de nous débarrasser.

 

Mais il est surtout permis de tiquer, et gravement, en voyant figurer dans ce « curriculum commun » des ESPE un item  « mécanismes et difficultés d’apprentissage », non parce qu’il s’agit des sempiternelles sciences-sic de l’éducation – nous sommes assez conscients des rapports de forces pour avoir bien compris qu’elles sont devenues incontournables, quels que soient par ailleurs leur pouvoir de nuisance ou leur (in)validité, simplement du fait que leurs tenants, dans certains syndicats ou groupes de pression comme chez les parents d’élèves, sont  désormais aux commandes – mais parce qu’il peut sembler étonnant, y compris dans une logique didacticienne, de considérer que lesdits  « mécanismes et difficultés d’apprentissage » sont les mêmes, par exemple, chez l’enfant de maternelle et l’adolescent de collège. On assiste donc à la résurrection de l’apprenant abstrait aux difficultés abstraites, abstraitement éducable par des recettes abstraites, lesquelles, au dur contact d’un réel qui résiste, feront la preuve de leur inefficacité dès que le néo-titulaire se retrouvera dans sa classe aux prises avec une bonne trentaine de  Kévin Dugenou  aussi énergiques que concrets.

 

Certes, m’objectera-t-on, mais vous êtes d’une mauvaise foi punique, Apollonie, puisque « le principe de l’alternance (sera) au cœur de la formation des personnels » !  Donc, s’effectuera un aller-retour entre la théorie et la pratique, l’alternance assurant à la fois la pratique de la théorie et la théorisation de la pratique !  Pour ce qui me concerne, punique ou pas, je crains que ce praxisme soit surtout l’occasion de noyer les compétences disciplinaires dans les eaux bourbeuses du pédagogiquement correct.

 

Les participants à la concertation, me semble-t-il, ont flairé le danger. Est-ce pour tenter de remédier à ce retour en force des sciences de l’éduc dans la formation que le rapport, qui se veut consensuel on l’a vu, propose de « faire toute leur place à des praticiens en activité (professeurs du primaire et du secondaire mais aussi inspecteurs, chefs d’établissements et associations) aux côtés des universitaires dans les équipes de formateurs des ESPE » (bas p.44) ? Encore faudra-t-il être transparent sur les critères (de conformité à la pensée unique pédagogique, on peut le craindre) selon lesquels « professeurs du primaire et du secondaire » et « associations » seront intégrés dans le dispositif. Quant aux chefs d’établissement et aux inspecteurs, nous faisons assez confiance  à l’UNSA-FEN, majoritaire dans leurs rangs, pour ne pas douter qu’ils vont dans le système s’octroyer la part du Lion…

 

 

Alors, IUFM, SGEN-CFDT, UNSA, CRAPs, la revanche ? C’est l’évidence même. Ils occupaient déjà le terrain avec la droite. Alors, avec la gauche… Et l’on n’en doute plus en lisant, p. 45, dans  l’item « Un métier qui s’exerce », les deux premiers paragraphes qui reprennent tous leurs dadas bien connus, comme « reconnaître la dimension collective du métier, (travail en équipe, échange sur les pratiques, partenariat avec les parents et les divers acteurs territoriaux, innovation) par des temps institutionnels dédiés », exemple même de la fausse bonne idée ouvrant sur les 35 h de présence dans l’établissement, royalement proposés naguère par la candidate socialiste avec le succès que l’on sait. Qu’il me soit permis de préférer les conversations devant la machine à café, sous les grands marronniers de la cour ou au bistrot du coin, à ces « temps institutionnels dédiés » qui le seront surtout à la caporalisation du métier et  à l’imposition, par la grâce injonctive des collègues les plus forts en gueule ou les mieux en vue,  d’une pédagogie officielle et d’un travail même plus d’équipe mais de coterie  : sauf avis contraire et jusqu’à plus ample informé, nous sommes encore les concepteurs de nos cours.


 

Quant à l’idée de « rompre avec la rigidité des emplois du temps hebdomadaires en se donnant la possibilité de globaliser un certain nombre d’heures, dans une fourchette précise et négociée, pour faire évoluer les pédagogies , permettre le travail inter et pluridisciplinaire », comment ne pas voir que c’est la porte ouverte à l’annualisation des services, ce qui devrait mettre vent debout tout syndicat digne de ce nom – je ne parle pas de celui qui depuis des années « travaille pour l’abaissement matériel et moral de ses propres membres » (J.-C. Milner, De l’Ecole), bien sûr.

 

En ce qui concerne l’évaluation des professeurs, en revanche, le rapport, apparemment a choisi le profil bas. Il faut dire que c’est un sujet sensible, et que le défunt projet Chatel d’évaluation par le chef d’établissement avait fait l’objet, pour des raisons d’ailleurs parfois divergentes, d’une unanime hostilité.

Après avoir souligné que « le système actuel n’est pas satisfaisant », l’item « Un métier qui s’évalue » va même jusqu’à reconnaître que « l’évaluation pédagogique (est) réduite à un contrôle de conformité » (haut p. 46), remarque pleine de lucidité et que nous ne pouvons qu’applaudir, tout comme (ibid.) le rappel de la « double fonction de l’évaluation, le contrôle et le conseil »(c’est moi qui souligne à l’attention des IEN ou IPR flingueurs tels que nous en avons tous connus au cours de notre carrière).  Néanmoins, le dernier paragraphe, « faire de l’évaluation un processus qui (…) prend en compte (…) le travail en équipe, ainsi qu’une part d’autoévaluation », a de quoi refroidir notre enthousiasme. Avec cette histoire d’auto-évaluation, c’est le « cercle de qualité » qui entre à l’Ecole, cercle dont on sait que c’est sans doute la plus diabolique invention des capitalistes pour exploiter leur personnel en lui faisant croire qu’il est associé à un processus démocratique de gestion et de débat. De l’auto-évaluation à l’autocritique, il n’y a qu’un pas, et de l’autocritique à l’autodénigrement, il n’y en a qu’un autre et facile à franchir, surtout dans une profession qui a intériorisé  à l’extrême la culture de l’excuse pour l’élève et la culpabilisation de l’enseignant, responsable de tous les maux.


Et c’est ainsi qu’avec l’ « individualisation de la gestion et du suivi des personnels » (p. 45), on peut imaginer que les enseignants non conformes choisiront en quelque sorte sponte sua, après avoir bénéficié de « bilans de compétences » (ibid.), d’accéder « non seulement à d’autres niveaux d’enseignement mais aussi à d’autres types d’activité et de responsabilité » (ibid.), cette mobilité choisie s’avérant le meilleur outil pour faire choisir la sortie à tous les empêcheurs de pédagoger en équipe et en rond, le jour ils n’en pourront plus.

Car pour ce qui relève de la « (prise) en compte (du) travail en équipe » dans ladite évaluation, nul besoin d’être devin pour comprendre qu’elle obligera, dans la pratique, nos collègues à s’inscrire dans des projets dont les objectifs ou les modalités ne correspondront pas forcément à leurs valeurs, leur culture ou leur sensibilité, mais auxquels ils se sentiront tenus de participer pour être du côté du manche, -- comprendre de la pratique pédagogique dominante dans l’établissement. Plus besoin d’Inspecteur Guillotin, si vous êtes conduits de vous-mêmes à vous autocensurer pour ne pas dire à vous  autofliquer !

 

Adoncques, incités à trouver l’inspecteur qui sommeille en chacun de nous, nous marcherons  main dans la main, par la vertu de la pédagonigologie, vers la meilleure des Ecoles possibles…

 

J’ai gardé pour la bonne bouche, dans la quatrième grande partie « Un système éducatif efficace et juste », tout ce qui est écrit à propos du « partenariat parents-Ecole », qui doit être « redynamisé » (p. 46) et « s’impose aujourd’hui comme une évidence », ces évidences dont mes maîtres au primaire  m’ont toujours appris à me méfier autant que de la platitude de la Terre ou du mouvement apparent du soleil  – mais c’était il y a longtemps...

Autre certitude admirable, le principe même de la « coéducation » (ibid.) semble faire consensus, alors même qu’il est largement discutable, d’aucuns pouvant considérer que c’est aux parents d’éduquer leurs enfants, les enseignants n’ayant quant  à eux « que » le devoir de les instruire, ce qui est pourtant déjà énorme. De méchantes gens, dont je ne suis pas, pourraient même rajouter qu’à en juger par le comportement de certains élèves qu’on osera qualifier de goujats, de butors et de mal élevés, le travail éducatif minimal de leurs parents n’a sans doute guère donné de fruits – mais c’est un autre débat, sur lequel nous aurons certainement l’occasion de méditer.

 

Revenons donc à nos parents : « une prérentrée des parents », la « présence d’interprètes » auprès de ceux qui maîtrisent mal ou pas le français, pourquoi pas…En revanche, la suggestion d’un « statut du parent délégué » tel qu’il est défini au bas de la p. 46 fait dangereusement monter mon taux d’adrénaline. En outre, que signifie ce « droit à l’information » qui existe déjà, que je sache, -- sinon de facto l’intrusion des parents à l’intérieur même de notre métier, dans nos compétences pédagogiques (rappelons que le rapport propose également de leur donner « le dernier mot » sur l’orientation) et au mépris de la confidentialité ? Cette revendication des géniteurs d’apprenants à vouloir se mêler de tout, y compris de ce qui ne relève pas de leurs compétences, a quelque chose d’inquiétant. Quant à la demande de « réunions à des horaires compatibles avec les obligations professionnelles des parents », je dois avouer qu’elle est d’une rare stupidité : elle obligerait tous les conseils de classe à se tenir après 18h30, ce qui est bien sûr impossible, -- ou alors  le dimanche, à l’heure de la messe ?!!! Il serait beaucoup plus simple (et plus efficace)  d’imposer aux employeurs de libérer les parents délégués afin qu’ils puissent, sur leur temps de travail, se rendre dans les établissements.  

Justes Cieux,  damned, gasp et gloups, quelle parole a franchi la barrière de mes dents ! J’avais juste oublié, sotte que je suis, qu’il faut ménager nos pauvres patrons nécessiteux et accablés de charges et de contraintes...  Mille excuses : je me croyais  sous la gauche.

 

 

 

En somme et si je récapitule sur « Des personnels formés et reconnus », cette troisième partie  ne donne guère de raisons de se réjouir, en dépit de son titre alléchant : le modèle de formation proposé y est hautement contestable, et pour ce qui est de la reconnaissance, j’avoue ne rien avoir trouvé dans les trois pages à ce sujet – le mot « revalorisation », en particulier, brille d’une radieuse absence, et ce n’est pas un hasard : nous qui sommes de purs esprits animés par la passion de transmettre, nous nous contenterons de reconnaissance morale… à condition de faire tout bien comme on nous dira.

En effet,  pour ce qui relève de notre bonne vieille « liberté pédagogique », elle semble passée à la trappe par un texte qui vise à contenter tout le monde sauf la majorité des enseignants telle qu’elle s’exprime pourtant dans leurs syndicats majoritaires et représentatifs :  non seulement les enseignants seront évalués par leurs inspecteurs et leurs chefs d’établissement, comme cela s’est toujours fait, mais encore ils seront fliqués par eux-mêmes (auto-évaluation), par leurs collègues (« nécessaire travail en équipe »), et enfin, puisque tout ceci manifestement ne suffit pas, par les parents statutairement délégués. Après quoi ils pourront, bien sûr, exercer leur métier librement, sous le contrôle de quatre ou cinq censeurs comme disait le Figaro de Beaumarchais…

 

 

Depuis la parution de ce rapport, j’ai entendu le discours du Président de la République, puis celui de Vincent Peillon, apparemment décidés à mettre l’accent sur le primaire, sans doute pour contourner l’opposition prévisible des professeurs du second degré à certaines des mesures proposées, ressenties si elles étaient mises en pratique, comme de véritables provocations.

La seule chose qui me rassure un peu dans toute cette histoire, c’est que François Hollande, à défaut d’être un homme énergique, est intelligent : dans un contexte où les socialistes touchent le fond de sondages décidément sans pitié, ils n’ont pas les moyens de se payer le luxe d’un conflit frontal avec les professeurs, qui sont quand même (ce qui montre, entre parenthèses, leur abnégation politique et leur sens de la discipline républicaine) majoritairement leurs électeurs. Ni le ministre ni le président ne sont  stupides : sachant fort bien compter (compétence du socle, validée !) ils ont compris qu’ils ne peuvent pas, même pour faire plaisir aux syndicats minoritaires dont ils sont  les otages et à un quarteron de groupuscules pédagogistes où leurs militants sont sur-représentés,  se permettre de braquer la majorité du corps enseignant.

 

« Jospin, vire ton copain, sinon, gare au scrutin »… Cet allègre et roboratif slogan est encore dans toutes les mémoires. Doit-on d’ores et déjà envisager une variante, qui ferait par exemple rimer « Ayrault », « poteau » et « veto » (des urnes) ?  Espérons que nous n’en arriverons pas à ces pénibles extrémités – mais je fais assez confiance à François-Hollande-Président-de-la-République pour avoir la sagesse de faire le minimum et même de ne rien faire : ne faisant rien, il fera bien.

 

 

Pour le numérique (suite et fin du rapport), ce sera pour la prochaine fois, vu le format du blog !

 

 

Sur le site de l’association http://www.r-lecole.fr/ :

 

deux articles de Pedro Cordoba sur les concours de recrutement,

http://www.r-lecole.fr/iufm/place_concours_pc_2012.html

et, plus récent et plus spécifiquement consacré au « deuxième concours », http://www.r-lecole.fr/iufm/second_concours.htm

Voir également le topo passionnant de Daniel Tchalik, pianiste et professeur de composition, sur « l’enseignement de la musique la subversion de l’école »

http://serveur1.archivehost.com/membres/up/1919747526/blogmezetulle/Telechargements

_permanents/TchalikAutonomieEtablissMusiqueSept2012.pdf


(1) Il y a divergence entre la CDIUFM et le cabinet Peillon sur la place du concours. Tout le monde veut « intégrer » le concours dans la formation initiale i.e. dans le master. Mais les IUFM veulent garder le concours à la place qui lui fut attribuée par X. Darcos (M2) tandis que V. Peillon le veut en M1 (soit à Bac+4) comme avant la réforme.

(2) Le chiffre de 43 000 postes en 2013 est inexact puisqu’il inclut les 21 350 qui passeront l’admissibilité en juin 2013 et l’admission en juin 2014. Ces lauréats ne seront recrutés qu’en septembre 2014 et pas du tout dans l’année 2013

(3) On reproduit en effet les IUFM mais avec une obligation supplémentaire : il faut que les candidats obtiennent à la fois le concours ET le master. Les IUFM étaient déjà incapables de s’acquitter de leur mission (d’où la masse énorme de candidats obligé de s’adresser au privé surtout pour le professorat des écoles). Avec un master en plus, cela devient du délire.

 

 

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7 octobre 2012 7 07 /10 /octobre /2012 17:52

 

 

 

 

 

 

Voici donc, tout frais sorti, le rapport de la Grrrrande Concerrrrrtation, tel que vous  pouvez le trouver en ligne ici :

 

http://www.refondonslecole.gouv.fr/la-demarche/rapport-de-la-concertation/  

 

… cinquante pages que la Présidente, n’écoutant que son dévouement à la Cause de  l’instruction publique,  vient de lire avec l’attention requise -- et, toute modestie mise à part, elle a bien du mérite.

 

Comme d’aucuns l’ont déjà relevé, le sarcasme n’est pas mon fort.  Je vais donc, avec toute l’objectivité dont je suis capable, proposer  à celles et ceux qui n’ont ni le temps ni le courage de s’avaler ce pensum, une petite synthèse  des préconisations  dudit rapport, cum commento.

 

L’évaluation, c’est bien connu de tous les enseignants, ne doit pas être décourageante a priori, mais valoriser avec bienveillance les points positifs de la prestation.

C’est donc de très bonne grâce que je reconnais aux rédacteurs de ce rapport un certain talent, et même un talent certain,  pour dire tout et son contraire, avec un art consommé de la synthèse fumeuse où seuls des esprits chagrins reconnaîtront l’expérience acquise lors d’antérieurs congrès du Parti Socialiste : comment contester la réaffirmation (p. 3) de « la place centrale de l’École comme lieu d’acquisitions et d’apprentissages, comme facteur d’intégration sociale, comme instrument de la promesse républicaine : celle d’un égal accès au savoir, un savoir qui instruit, éduque, émancipe et permet l’insertion dans la société » ? Qui diable pourrait s’opposer à la généreuse ambition « d’inverser une évolution des performances dont les indicateurs nationaux comme internationaux montrent qu’elle se dégrade » (ibid.), idée reprise pp. 9 sqq., où il est reconnu que « le niveau moyen des acquis scolaires stagne », doux euphémisme pour admettre, sans en avoir l’air, que le niveau baisse tout en ne baissant pas, comme la flèche ailée de Zénon ?  Comment ne pas se réjouir en lisant, toujours p. 3, qu’il ne s’agit « ni de se contenter d’aménager l’existant ni de mettre à bas tout l’édifice, (ni  de) refonder à partir d’une tabula rasa, mais (de) réexaminer pour donner du sens en se ressourçant sur des valeurs » ? Comment ne pas applaudir en lisant, p. 13, que « c’est (au primaire) que les élèves acquièrent -- ou non -- les bases solides nécessaires à la poursuite de leurs études » ? De même, tout Républicain digne de ce nom ne peut que souscrire au souci, p. 14, « d’éviter les affres du communautarisme et du repli identitaire », et boire du petit-lait, p. 23, devant le rappel d’une évidence douce comme le miel, selon quoi « c’est à l’École, en classe, que se transmet le socle disciplinaire robuste, solide et structuré à partir duquel se construisent les apprentissages dans leur continuité, leur progressivité et leur rigueur». On appréciera également à leur juste valeur la pertinence de remarques (passim) concernant la scolarisation des handicapés, l’importance de l’éducation à la sexualité, la lutte contre l’homophobie et le refus des discriminations.

 

 

Certes, en se montrant comme qui dirait ronchon, on pourrait objecter que « les organisations représentatives » (p. 4) ont été choisies selon des critères  quelque peu obscurs (voir http://leblogdelapresidente.over-blog.com/article-ne-nous-peillon-pas-de-mots-109776708.html), ce qui explique sans doute, toujours p. 4, que « le débat (…) n’a pas fait apparaître de clivages insurmontables »,  constat somme toute logique à partir du moment où les voix éventuellement discordantes n’étaient pas invitées à participer au concert. Mais n’épiloguons pas et revenons à notre rapport.

 

Je passerai rapidement sur toute la partie constat-diagnostic, de nature essentiellement sociologique et sur laquelle, en dépit de quelques divergences à la marge, on ne peut que s’accorder, en particulier pour tout ce qui concerne le creusement des inégalités scolaires mettant en danger le projet républicain – même si, on l’imagine, nous ne partageons pas forcément l’analyse de ses causes.

 

En revanche, les choses commencent sérieusement à se gâter p. 16, avec une présentation extrêmement tendancieuse de ce que les rapporteurs appellent « le cercle vicieux de concurrence, d’anxiété et de défiance » dans lequel est entrée notre Ecole, et qui  serait lié à des « évaluations vécues comme des sanctions », tout comme « le mal-être scolaire » (p. 17) est associé à « des disciplines dont certaines, notamment celles appuyant la sélection, sont devenues anxiogènes pour les élèves parvenus à des étapes déterminantes de leur cursus » -- comprendre, naturellement, les mathématiques, sondage à l’appui en note 4.  Consternant, parce qu’on voit venir l’arnaque, lentement mais sûrement.

 

C’est en effet à ce moment-là que le rapport  devient anxiogène pour l’infortunée Présidente, qui, en lisant (toujours p. 17) que « les pratiques éducatives traditionnelles peuvent jouer négativement sur l’estime de soi, la motivation des enfants », et « qu’elles ne s’inscrivent plus dans l’évolution des qualités humaines mises en avant par notre société (comme) la créativité, l’imagination, la collaboration… », est saisie d’un noir pressentiment et parcourue d’un frisson d’horreur anticipative. Tout le discours d’accroche laïque qui a précédé, toutes les ressources de la sociologie consensuelle, toute la phraséologie républicaine des premières pages, se trouvent désamorcés, d’un seul coup d’un seul, par ces quelques phrases où l’on peut décrypter quelque chose qui s’apparente, volens nolens, à  un retour du refoulé : le texte a beau marteler en long et en large la nécessité de transmettre et d’instruire, ce qui rentre par la fenêtre ici, c’est le désir mortifère du pédagogue-sic d’en finir une bonne fois pour toutes avec les savoirs savants, comme disent les khuistres, pour, à coups « d’expérimentations innovantes » (p. 19) et à grand renfort de numérique, tourner la page ringarde de la norme culturelle au profit de la « culture juvénile ». C’est donc avec effroi que l’on peut lire, en bas de la p. 20, qu’ « on voit bien pourtant tout le profit que l’institution scolaire pourrait tirer à s’appuyer sur les nouvelles pratiques des jeunes notamment en termes de capacités de communication entre pairs, de fabrication de solidarités horizontales et donc de collaboration, de maîtrise des nouvelles technologies ». Ben NAN. On ne voit pas en quoi le bidouillage sur les réseaux sociaux et la pratique du copier-coller pourraient contribuer à développer l’instruction publique, sauf à  confondre  pédagogie et démagogie…

 

On comprend alors ce que signifie « revisiter » au bas de la p. 21 : « (L’Ecole) doit donc se renouveler et se refonder, autour de valeurs qui lui donnent son sens et entrer dans la modernité, en revisitant (c’est moi qui souligne) les missions et les principes qui la gouvernent et auxquels les Français sont attachés » : « revisiter », c’est comme dans les mises en scène de Dmitri Tcherniakov (ceux qui ont vu son désastreux Don Giovanni à Aix il y a deux ans me comprendront) : on assassine, on découpe en tranches, on disperse façon puzzle, puis on recolle tout dans n’importe quel ordre et on attend que ça fasse sens – et ça fait toujours sens, comme un cadavre exquis, ou le joli poème dadaïste de Tristan Tzara.

 

Dans ces conditions, il n’est pas surprenant de trouver ou plutôt de retrouver, dans la deuxième partie du rapport (pp. 22 sqq.), toutes les formules magiques de la vieille pédagogie moderne -- comme Salvador Dali parlait du « vieil art moderne » : « transformer les contenus d’enseignement (…) mais aussi les modalités de leur transmission et leur appropriation » (p. 23), « dépass(er) les frontières académiques traditionnelles » (p. 24), prendre acte du fait que « la posture encyclopédiste, qui a tant marqué la culture scolaire française traditionnelle, est (…) dépassée » (ibid.), et, mirabile visu, l’immarcescible tarte à la crème de l’«apprendre à apprendre » via « les projets pluridisciplinaires », les « nouveaux registres de connaissances et de savoirs », « l’approche par compétences »  ((ibid. et derechef), la « relance des TPE » (p. 37) « placer l’élève, l’enfant, l’adolescent et son bien-être au cœur des préoccupations » (p. 31), le « collège où l’on apprend autrement » (p. 34), « plutôt qu’une notation-sanction, une évaluation positive simple et lisible » (ibid.)… Bref, tout le jacassin du SGEN et de l’UNSA mis à la portée des caniches ! Tout ceci, logiquement, va dans le sens d’un allégement des programmes, en particulier « à l’école élémentaire (où ils sont) jugés trop lourds » (p. 32), du « remplace(ment) progressif du redoublement, coûteux et inefficace » (p. 35) et, retour du serpent de mer, de « la suppression effective des devoirs à la maison » (p. 33), qui ravira à peu de frais les géniteurs d’apprenants :  nihil novi sub pedagogistico sole.

Tout ceci est développé pp. 30 sqq., sous la rubrique « refonder par la pédagogie », qui réaffirme l’importance des « pratiques innovantes », au prétexte que « l’école est restée dans l’ensemble fidèle à une pédagogie frontale traditionnelle » -- ce qui laisse rêveur quant à la connaissance réelle, par les crânes d’œuf de la commission, de ce qui se fait concrètement dans les classes : sans doute aurait-on dû leur proposer un petit stage chez nos amis du GRIP-SLECC ?  Car il faut « consolider les premiers pas dans la lecture », certes, mais selon les « pratiques innovantes » dont « les exemples étrangers et les enseignements de la recherche » prouvent l’efficacité.  On retrouve ici l’imparable raisonnement selon lequel l’échec scolaire vient d’une supposée absence d’innovations, et non d’expérimentations hasardeuses – ce qui me rappelle irrésistiblement les raisonnements du regrettable Staline, expliquant que l’échec de la collectivisation tenait au fait qu’on n’avait pas assez fusillé de koulaks.

 

 

C’est donc en fonction  de ces « nouvelles pédagogies », sans oublier le numérique, nouveau Schibboleth, que va se construire « une formation des enseignants de qualité » (p. 30), « qui fera toute sa place à la dimension professionnalisante,  aux côtés des savoirs académiques indispensables » (Ah tout de même).

On reconnaît ici les influences délétères du SGEN-CFDT et de l’UNSA-FEN, dont on peut identifier à plusieurs reprises les plus risibles dadas, par exemple au bas de la p. 31, avec la proposition, prétendument pour « fluidifier la transition » entre l’école et le collège, d’une « redéfinition des cycles pouvant être situés sur les deux niveaux d’enseignement « : il ne restera plus alors qu’à recréer la bivalence et le corps des PEGC !

Sans doute pour les mêmes raisons, en ce qui concerne le second degré, il n’est pas envisagé (p. 36) de « remettre en cause la réforme en cours  dans les voies générales et technologiques » dite réforme Descoings,  qui a transformé les lycées en usines à gaz. Seule « une évolution à moyen terme, par les pratiques, l’expérimentation et la formation est privilégiée », ce qui est, si l’on sait lire, un excellent moyen de ne rien faire de sérieux pour revenir en arrière : pour une fois que l’on n’aurait pas  reproché au gouvernement un rétropédalage, il semble que les rédacteurs du rapport aient préféré maintenir l’existant…  

 

 

Dans la rubrique catéchisme citoyennisant, gardons pour la bonne bouche, p. 25, « la participation aux instances représentatives et/ou à la vie associative de (l’) établissement », les « projets citoyens » p. 26, le « vivre ensemble » (ibid.), et une notion qui personnellement m’inquiète un peu dans sa formulation, celle d’un « pluralisme raisonnable » (p. 26 toujours), qui me semble sonner comme un bémol dans ce beau discours laïque.

On ne sera pas davantage étonné de retrouver le vieux couplet des « relations interpersonnelles horizontales entre tous les acteurs de l’École » (bas p. 26), dont il est clairement expliqué en haut de la page suivante que « c’est par ce type de méthodes, bien davantage que par des cours magistraux, que l’École peut, par exemple, lutter contre les stéréotypes racistes, sexistes ou homophobes ». L’idée née des Lumières, selon laquelle la culture savante, qui donne  à chacun les outils de la raison, constitue  la meilleure arme contre les préjugés, n’a manifestement pas effleuré les rédacteurs du rapport, quelle qu’ait été par ailleurs la tonalité « républicaine » de l’avant-propos.

 

 

Et c’est ainsi, p. 27, qu’on en arrive sans surprise à « la nécessaire rénovation du socle commun »,  à la « rénov(ation) de notre système d’évaluation qui produit trop souvent de la démotivation et de la mésestime de soi » (p. 28), ce qui va enchanter M. Antibi,  et à  une ouverture de l’Ecole aux familles « afin de leur reconnaître davantage de responsabilité dans les parcours et l’orientation de leurs enfants » (ibid.), avec en particulier  « davantage de liberté (…) dans l’orientation en fin de 3e », et même la proposition  « d’expérimenter la possibilité de laisser le dernier mot aux parents en matière d’orientation en fin de seconde (…) et sur le redoublement à tous les niveaux de la scolarité » (p. 38).  -- Les enseignants en seront-ils pour autant dispensés d’assister aux conseils de classe ??? Oui,  je sais, j’exagère – mais à peine.

 

 

Si je veux être totalement objective et ne pas faire preuve de malhonnêteté intellectuelle, j’observe avec plaisir que le rapport insiste, p. 29, sur la nécessité d’outils « moins prescriptifs », avec  « (des) réformes (qui) doivent être désormais mieux préparées, selon un processus participatif, associant les acteurs de terrain, personnels comme institutionnels », et une « conception des programmes scolaires (qui)  prenne en compte l’avis des enseignants ». Cela dit, la création (bas p. 29) d’une « instance indépendante qui coordonnerait (la) politique d’évaluation » des réformes peut laisser craindre, une nouvelle fois, la prise de pouvoir par les experts en expertisation de l’expertise.

 

 

Un mot, enfin, sur la question des « rythmes éducatifs adaptés et respectueux des besoins des enfants » (p. 40). Loin de moi l’idée d’entrer dans une polémique complexe sur la valeur scientifique de la chronobiologie (personnellement, mon pic de vigilance se situe entre 23 h et minuit, mais je ne pense pas pouvoir convoquer mes étudiants sur ce créneau-là sans créer quelques graves malentendus…), mais on peut s’étonner de voir que l’alibi de ladite chronobiologie permet de modifier l’approche du temps scolaire sans garantie d’amélioration de la performance des élèves (pardon pour les génitifs en cascade…) , et au grand dam des enseignants qui, de facto, vont travailler plus pour gagner aussi peu, surtout si l’on envisage, de manière totalement irréaliste, « d’allonger d’une à deux semaines la durée de l’année scolaire » et de « reconquérir le mois de juin, en réformant les procédures d’orientation et de passage des examens de manière à pouvoir retarder les conseils de classe à la fin du mois «  (p.  41). On peut même se demander si la proposition (p. 34) de « moduler les emplois du temps en fonction du projet pédagogique (et) envisager des emplois du temps plus souples et évolutifs » n’ouvre pas la porte à l’annualisation des services.

Bref, il y avait les geonpis, il y a à présent les cucos...  Mais rien ne dit que le gouvernement capitulera aussi vite devant les enseignants qu’il  l’a fait face aux patrons de start-up ;-(

 

 

Toute la fin du rapport, « des personnels formés et reconnus » (pp. 44 à 50), fera l’objet d’une autre note, celle-ci étant déjà fort longue pour le format du blog, et parce que le sujet est suffisamment grave et complexe pour justifier une analyse à part entière. Mais, autant le dire tout de suite, il n’y a pas grand-chose à sauver de ce côté-là non plus…

 

 

Bref, ceux et celles d’entre nous qui avaient espéré autre chose que la reconduction paisible, obstinée et réitérée de toutes les procédures ayant fait preuve de leur inefficacité, pour ne pas dire de leur pouvoir de nuisance,  n’auront que leurs yeux pour pleurer. Les autres n’en auront retiré que l’amère satisfaction cassandrienne d’un « je vous l’avais bien dit », qui n’a jamais donné le sourire qu’aux cyniques dont nous ne sommes pas.

En outre,  je crois bien que je vais devoir rester brune …  (voir http://leblogdelapresidente.over-blog.com/article-dans-concertation-il-y-a-d-abord-certation-107924933.html ) car ce n’est pas demain la veille, sauf rebondissement inespéré, que je deviendrai Casque d’Or. Dommage : j’aurais bien tenté le coup, finalement.

 

 

Apostille :

Au terme de cette éprouvante lecture, je tiens à  remercier  très fort le domaine Riberach à Bélesta en Roussillon, http://www.riberach.com/articles-2/2-7-rouges/ , le sympathique chef Cyril à Meyreuil pour son délicieux repas http://www.biochef.fr/ ,  tous les contributeurs du forum  NéoProfs http://www.neoprofs.org/ et naturellement John, mes amis et camarades du GRIP-SLECC http://www.slecc.fr/GRIP.htm, sans oublier, pour la Beauté qui sauvera le monde,  l’immense Paolo Fresu http://www.youtube.com/watch?v=C99coGU1Jhk,  qui m’ont tous, d’une manière ou d’une autre, soutenue ce soir dans cette dure épreuve.

 

 

Les réactions : 

 

Dernière minute : Ph. Meirieu se dit déçu par le rapport Refondation :

http://www.lepoint.fr/societe/philippe-meirieu-je-ne-vois-pas-de-projet-fort-pour-l-ecole-05-10-2012-1513865_23.php

 

et le SNES est d’ores et déjà vent debout : ça va saigner  ! http://www.neoprofs.org/t53544-message-du-snes-p-suite-a-la-publication-du-rapport#1658644

 

La réaction du SNALC-FGAF :
http://www.snalc.fr/affiche_article.php?actu=1&id=752&id_rep=281

 

Une analyse d'Estelle Manceau pour le Collectif  "Sauver les lettres"

http://blogs.mediapart.fr/blog/estelle-manceau/081012/le-rapport-sur-lecole-bien-decevant-malgre-de-grandes-ambitions


Le communiqué de presse de SLL, en date du 15 octobre 2012 : « Refondons l'école de la République : un rapport inquiétant »

 

Le commentaire un peu accablé de J.-P. Brighelli,  http://blog.causeur.fr/bonnetdane/la-montagne-et-la-souris,00384

 

Une  analyse extrêmement critique du rapport, par le sociologue Choukri Ben Ayed, sur le site du jus pédagol  : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2012/10/09102012Article634853618631571249.aspx

 

Et n’oubliez pas le site de Reconstruire l’Ecole, http://www.r-lecole.fr/

 

 

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19 septembre 2012 3 19 /09 /septembre /2012 08:57

 

 

 

 

 

 

 

http://www.lemonde.fr/enseignement-superieur/article/2012/09/17/le-gouvernement-envisage-la-fin-de-la-gratuite-des-prepas_1761175_1473692.html

 

Le gouvernement envisage la fin de la gratuité des classes prépas : c’est ce que l’on pouvait lire avant-hier dans le quotidien de référence, toujours dans le secret des dieux semble-t-il. « Ce privilège (sic), le gouvernement envisage de le supprimer, du moins pour ceux qui ne sont pas boursiers. "C'est une piste à étudier, confie-t-on dans l'entourage de Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur. Elle le sera sans doute en début d'année prochaine." De même source, on confie qu'il y a là une question d'"équité" "Il faut que toute personne entrant dans le post-bac se trouve dans la même situation." »

 

Au cas où les lecteurs n’auraient pas bien saisi la portée de cet intoléraaaable scandale, La Pravda  Le Monde enfonce le clou : « La formation la mieux encadrée, la plus onéreuse par étudiant pour l'Etat, celle qui ouvre les portes des très grandes écoles et, du même coup, les postes les plus en vue du pays est gratuite. Aucun droit d'inscription n'est demandé aux étudiants en classe préparatoire aux grandes écoles, quand l'inscrit à l'université s'acquitte de 181 euros. »


On n’en attendait pas moins de ce journal, qui, après le désolant article de Madame Desplechin sur l’enfer des prépas (voir http://leblogdelapresidente.over-blog.com/article-l-enfer-des-cpge-ou-une-belle-operation-d-intox-98522018.html ) poursuit obstinément, sans dévier de son sillon, sa campagne de dénigrement des CPGE.


Le seul problème, c’est que depuis plusieurs lurettes les étudiants de prépa, et particulièrement les littéraires, s’inscrivent à l’Université en début d’année, et paient, précisément, quelques centaines d’euros pour des cours auxquels, et pour cause, ils n’assisteront pas, puisqu’ils seront, au même moment, en train de gratter dans leur salle d’hypokhâgne ou de khâgne. J’irais même jusqu’à dire que l’hypokhâgneux ou le khâgneux représente, quelque part, l’étudiant idéal pour l’Université : il ne vient ni en cours ni aux partiels, et on n’a même pas à le former ! Tout juste lui délivrera-t-on, et parfois en barguignant,  une « dispense » en fin de première et de deuxième année (ce que l’on appelait autrefois « équivalence »), afin de l’autoriser à poursuivre le cursus LMD.


Par ailleurs, « l’entourage » de Mme Fioraso, s’il s’était documenté, aurait découvert que les CPGE sont loin d’être un ghetto de riches. Pour en rester à un établissement que je connais bien, le mien, on y trouve cette année en lettres sup. plus de 50% de boursiers, et plus de 33% en maths-sup.

Et en ce qui concerne « l’équité », le SNES-FSU  a réalisé une petite étude, fort édifiante,  quant au coût des concours : un véritable racket sur les étudiants de prépa scientifique !

http://www.snes.edu/La-gratuite-en-prepa-un-leurre.html

 

Adoncques : si « l’entourage » de la ministre avait consenti à se renseigner un tant soit peu, il se serait évité de dire une kh ânerie. Il se serait également évité un rétropédalage dont nos nouveaux princes semblent décidément avoir le secret : « Ce sera plutôt une double inscription », déclarait en effet quelques heures plus tard Mme Fiorasso sur les ondes d’une radio périphérique :

http://www.europe1.fr/France/Prepas-plutot-une-double-inscription-1242411/  

C'est-à-dire  EXACTEMENT ce qui se fait depuis des années !!!!


     En somme, not' minisse découvre l'eau tiède et le fil à couper le beurre.  


     Loin de moi l’idée de médire, œuf corse, mais je note que c'est très très « socialo » comme cheminement conceptuel : on commence par tonitruer des proclamations vertueuses et/ou incendiaires contre d’inacceptables « privilèges », pour finalement, sous couvert de changement-c'est-maintenant, rester dans le statu quo -- ce qui vaut mieux que de faire des bêtises, je vous l'accorde, mais le cumul n'est pas interdit. 


     Quitte à me répéter (mais « la redondance est pédagogique », comme disait Mme Ayme, ma géniale professeur de philo en KH), je remarque qu'il est plus facile aux crânes d'œuf qui nous gouvernent de taxer les taupins et les khâgneux que de lutter contre les superprofits, l'évasion fiscale, les licenciements boursiers, les délocalisations, ou que de mettre en place les fameux 75% -- d'autant que c’est tellement chic, de taper sur les CPGE, ça fait « de gôche », ça fait Bourdieu (que de crimes on commet en son nom !) , quôa...


Si l’on avait voulu vraiment réfléchir sur les prépas, au lieu de les « stigmatiser » (verbe à la mode, qui m’insupporte parce qu’il est utilisé à toutes les sauces, et que j’emploie à  dessein), on aurait mieux fait de se demander pourquoi de moins en moins d’élèves issus de la classe ouvrière, du monde rural ou de l’immigration, y ont accès. Où sont les Senghor et les Césaire d’aujourd’hui ?

Un de mes anciens étudiants (bonjour, Vincent !), jeune agrégé  d’histoire enseignant en banlieue parisienne, me fait observer que, «  (par) exemple (à) La Courneuve, les élèves ne connaissent quasiment personne qui fasse des études supérieures dans leur entourage. Personne pour les y inciter. Aucune connaissance d'une voie aussi royale que la prépa. Et le sentiment terrible, et peut être vrai, de s'y trouver en parfait intrus. » Et ce jeune homme, brillant enseignant tout dévoué à ses élèves, de conclure avec une mélancolie qui m’interpelle, moi son ancien professeur: « Tout cela pour dire que la fréquentation du 93 me fait très mal à la République, et qu'il est évident pour moi que, mécaniquement, un fils d'immigré dont les parents ne sont pas francophones (et parfois illettrés), pas insérés et en grande précarité,  n'ira pas en prépa. Même s'il est doué. Pas besoin de ne pas le recruter, ses propres conditions d'existence l'ont déjà exclu du recrutement. »

 

On ne saurait mieux dire : si l’on veut en haut lieu une véritable ouverture sociale en CPGE, ce sont les CONDITIONS D’EXISTENCE de ces lycéens et de leurs parents, en amont, qu’il faut améliorer et rendre dignes, au lieu de taxer encore un peu plus des préparationnaires qui, de toute façon, paient déjà –  parfois beaucoup – et sont loin d’être tous des fils de riches ! Mais, sans aller jusqu'à employer de grands mots comme "Révolution", s’attaquer aux conditions d’existence des « Misérables » d’aujourd’hui, c’est beaucoup plus difficile, et bien plus dangereux, que de dénigrer les CPGE…


     N'attendant pas grand-chose du  Parti Socialiste, je ne peux pas dire que je sois le moins du monde « déçue ». Mais je demeure tout de même rêveuse, et un peu désolée, devant une telle conjonction d'amateurisme, d'incompétence et de prétention jalouse -- pour tout dire de BÊTISE au sens flaubertien du terme. Personne n’a à y gagner, et surtout pas l’Ecole !

 

Voir également, sur le site de l'APPLS la contribution de la Conférence des CPGE pour les Assises de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche.

 http://www.netvibes.com/appls#REFLEXIONS_et_orientations

 

Et bientôt du nouveau sur le site de RE : http://www.r-lecole.fr/ 

 

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5 septembre 2012 3 05 /09 /septembre /2012 16:23

 

 

 

 

 

 

 

Chic chic c’est la rentrée, forcément meilleure que les précédentes, depuis que nous avons à présent au gouvernement des ministres qui nous aiment puisqu’ils sont socialistes (du moins en théorie), citent Michelet, Edgar Quinet, Victor Hugo et Jules Ferry, évoquent les Lumières, le libre jugement, la laïcité, et  déclarent vouloir refonder l’Ecole  autour de la République et la République autour de l’Ecole – paroles douces aux oreilles des vieux « Républicains » (nous l’a-t-on assez reproché…) que nous sommes, naturellement.


Alors, pourquoi la Présidente, qui comme tous les enseignants a repris le collier pleine d’énergie, d’élan et de vigueur, se sent-elle néanmoins assaillie de noirs pressentiments, concernant en particulier tout ce qui pourra sortir de la  concertation sur l’Ecole organisée par le ministre sous la bienveillante égide de Bruno Julliard ?


Est-ce d’avoir entendu M. Peillon expliquer sur Europe 1 que « les élèves français (…) sont ceux qui souffrent le plus, avec les petits Japonais », ce qui ne peut que faire hurler de rire et/ou de rage tout enseignant normalement constitué s’évertuant contre vents et marées à mettre lesdits élèves au travail, eux qui souffrent surtout de ne rien faire et de perdre leur temps ? Une telle ineptie, proférée sur le ton dramatique qui convient, et assimilant nos potaches aux infortunés petits Japonais qui, effectivement, se suicident tant on leur met la pression, devrait ridiculiser celui qui la profère, même s’il se réclame des sociologues, dont on sait qu’ils sont suffisamment experts en expertise pour être crédibles dans les hautes sphères de la rue de Grenelle.


Est-ce, à propos de la grande  concertation,  de remarquer, et de déplorer avec Catherine Kinzler (http://www.mezetulle.net/article-l-ecole-de-la-republique-refondation-ou-reforme-109609448.html, une contribution passionnante au débat),  la « mise à l'écart des spécialistes disciplinaires, aussi bien les sociétés savantes que les associations de professeurs spécialistes », ce qui laisse mal augurer de la place du SAVOIR et de l’INSTRUCTION dans la synthèse à venir


Certes, m’a-t-on objecté après la parution sur ce blog en juillet dernier de ma note http://leblogdelapresidente.over-blog.com/article-dans-concertation-il-y-a-d-abord-certation-107924933.html , mais de quoi vous plaignez-vous, jamais contente que vous êtes ? Parmi les personnalités invitées, on trouve plusieurs représentants de l’anti-pédagogisme (pour aller vite), comme Denis Kambouchner ou  Jean-Paul Brighelli ! Vous voyez bien qu’on parlera pour vous !

 

Bien sûr, et je ne doute pas une seule seconde de la pertinence des observations que livreront nos deux amis. J’observe simplement qu’aucune ASSOCIATION de défense de l’Ecole et/ou des humanités n’a été conviée, pas plus « Sauver Les Lettres » que le GRIP ou RE, pas davantage l’ALLE ou SEL, qui, comme les sociétés savantes et les associations de spécialistes, semblent inconnus au bataillon Peillon.

En clair, on reconnaît en haut lieu que notre parole existe, mais portée par des individualités aussi brillantes qu'isolées, et ne représentant, en quelque sorte, que leur génie personnel. L’idée qu’il existe des associations de terrain faites de militants, d’alterpédagogues qui travaillent au contact des élèves, de défenseurs de l’instruction, ne semble pas avoir été intégrée par le Comité de pilotage – comme si rappeler encore et toujours  le DEVOIR D’INSTRUCTION avait quelque chose de gênant pour nos nouveaux gouvernants. Il faut dire que lorsque le discours officiel pose en principe numéro un qu’apprendre est pour les élèves français à l’origine d’une grande  souffrance,  on voir mal comment pourrait sortir de la concertation Peillon autre chose qu’un infâme brouet pédago enrobé dans de la phraséologie laïque et républicaine, comme on nappe de sauces trop riches les viandes un peu faisandées.

 

Bref, on va nous payer de mots, et ne rien faire – ce qui vaudrait peut-être mieux que d’entreprendre des réformes délétères qui achèveront le malade sous couvert de le refonder. Peut-être faudra-t-il que notre système scolaire descende encore un peu plus bas, si c’est possible, et que l’on touche le fond du fond, pour que le coup de pied salutaire, qui remette l’instruction (ni l’élève, ni l’enseignant) au centre du projet, soit enfin donné ?

En attendant (et il semble que ce soit, a priori, la seule mesure de grande  ampleur susceptible d’être prise),  les professeurs et les instituteurs auront le plaisir de voir rognées leurs vacances au nom du respect des rythmes biologiques, ce qui les fera travailler plus pour gagner autant. On a viré Sarkozy pour moins que ça, non ? ! Et la Présidente, qui a mauvais esprit, se demande avec intérêt comment le SGEN-CFDT et l’UNSA-FEN nous feront passer la pilule…  Mais c’est une autre histoire. 

 

Et toujours, le site de RECONSTRUIRE L'ECOLE, http://www.r-lecole.fr/

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8 juillet 2012 7 08 /07 /juillet /2012 15:43

 

 

 

 

 

 

Mon pauvre père – comme on dit dans le sud à propos d’un défunt qu’on a beaucoup aimé – ouvrit jadis le congrès de son petit syndicat de libraires avec un « Mes chers confrères, n’oublions jamais que dans ‘’libraire’’ il y a ‘’braire’’… », qui produisit son petit effet.

 

Je n’ai pu m’empêcher d’y repenser en lisant sur le site dédié à la grande concertation sur l’Ecole, http://www.refondonslecole.gouv.fr/, le détail des modalités de ce qui sera, à n’en pas douter, le grand œuvre de Vincent Peillon, et dont je me demande si, révérence parler, il ne se paie pas tout d’abord notre tête – celle des enseignants, naturellement, mais aussi celle des élèves, et plus largement celle du peuple français.

 

Quelques naïfs, à Reconstruire l’Ecole, se sont étonnés de ce que nous ne soyons pas conviés aux festivités, pas plus que ne le sont le Collectif Sauver Les Lettres, l’ALLE ou le GRIP-SLECC. Nous n'en concevons aucune amertume. Ne rêvons pas : pour ce qui concerne notre association, nous ne disposons ni de la visibilité ni des réseaux suffisants, à tous les sens du terme, pour intéresser les promoteurs de cette opération, qui ne vise rien d’autre qu’à donner une légitimité soi-disant démocratique au projet pédagogique, idéologique et technocratique concocté depuis quelques années par le Parti Socialiste et ses alliés de l’UNSA-FEN, du SGEN-CFDT, d’Education et Devenir, et autres CRAPs ejusdem farinae. Relégués dans les rangs de la droite passéiste ou des réacs de gauche par ceux qui ne nous ont pas lus, nous n’avons aucune parole susceptible de porter dans un cérémonial où, de facto, tout est mis en place pour que soient données, aux questions posées et qui sont parfois pertinentes, les « bonnes » réponses allant dans le sens de ce qui a été décidé à l’avance dans les divers think-tanks revenus bien en cour.

 

La présidente de RE irait-elle jusqu’à soupçonner les ministres de malhonnêteté intellectuelle dans cette affaire ? Certainement pas : nous savons bien que le PS, de ce point de vue, est absolument irréprochable. Mais il est permis de s’étonner et de la composition du  comité de pilotage qui rendra ses conclusions en octobre, et de la nature des questions posées, dont certaines incluent déjà la réponse en laissant parfois craindre des mesures pour le moins contestables, et de l’organisation des quatre groupes de travail.

 

Le comité de pilotage est donc composé de Nathalie Mons, professeur de sociologie à l'université de Cergy-Pontoise, Christian Forestier, ancien recteur et administrateur général du CNAM, François Bonneau, président de la région Centre et vice-président de l'ARF en charge de l'éducation, et Marie-Françoise Colombani, éditorialiste au magazine ELLE. Trois « technos » et une journaliste, tous choisis, j’imagine, pour la neutralité et  la salutaire distance qu’ils vont établir avec le vaste sujet de la réflexion…

 

Quant aux questions, ce sont parfois les bonnes, comme par exemple « la priorité à l'enseignement primaire et aux premières années d'apprentissage » en « dégageant les contenus, les méthodes et les modes d'organisation les plus efficaces » pour « s'attaquer au noyau dur de la difficulté scolaire », «l'ensemble de la scolarité obligatoire et ses enjeux, en particulier pour faire diminuer les sorties sans qualification et améliorer l'orientation ». Magnifique. Qui pourrait se prononcer contre ? Tout dépend des réponses qui seront données – et c’est là que  la situation  se corse : en effet,  les autres «questions décisives » sont  «l'amélioration des rythmes scolaires » (en clair, comment faire travailler plus les personnels en ne les payant pas davantage,  tout en  leur demandant de participer eux-mêmes à la destruction de leurs propres statuts) et « le recours à des méthodes de travail renouvelées et aux outils numériques », qui ouvre peu ou prou sur une didactisation gadgétique à l’efficacité aussi mousseuse qu’aléatoire.

Tout ceci permet surtout d’éviter de poser les questions qui fâchent, et particulièrement celle des programmes, autour de laquelle tout devrait s’articuler si l’on veut  vraiment re-fonder l’Ecole, c'est-à-dire  lui redonner, stricto sensu, des fondations, des fondements et des fondamentaux.

 

Les ministres évoquent également « la mise  en  place  d'une formation initiale et continue de qualité (…)  afin de revenir sur les graves insuffisances de la situation actuelle et pour adapter le métier de professeur aux nécessités de cette nouvelle ambition pour l'école » : comment ne pas comprendre « IUFM, le retour… » ? Car pourquoi changer des méthodes et des pratiques qui ont fait la preuve de leur inefficacité, puisque, dans l’esprit de leurs thuriféraires, la crise de l’Ecole vient précisément de ce que l’on n’est pas allé assez loin dans l’autonomie des établissements, l’expérimentation à tous crins, la déconcentration, l’élève au centre du projet, le décloisonnement, l’allégement des contenus et l’antibisme transcendantal ?



En ce qui concerne les quatre groupes de travail, il est parfois permis de s’interroger sur les critères de choix des personnalités qui les pilotent.  Rien d’étonnant, a priori, à ce que le premier, « la réussite scolaire pour tous », soit présidé par Nicole Belloubet, vice-présidente de la région Midi-Pyrénées, ancienne rectrice de Limoges et Toulouse,  et présidente d'une association nationale d'éducation populaire, la FOEVEN. En revanche, j'ai du mal à saisir au nom de quelle logique Agnès Buzyn, présidente de l'Institut national du cancer, présidente du conseil d'administration de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et membre du Comité à l'énergie atomique, va présider le second,  « les élèves au cœur de la refondation », sauf à en déduire que le sujet est particulièrement explosif, naturellement (OK, je sors cinq minutes). Le troisième, « un système éducatif juste et efficace », sera chapeauté  par un certain Francois Momboisse, président de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance, ce qui plonge la Présidente dans un abîme de perplexité…  J’aimerais, en toute bonne foi, moi qui ai toujours pensé que l’Ecole n’est pas une entreprise, que l’on m’explique en quoi la VPC peut servir de modèle d’efficacité scolaire. Mais je dois avoir mauvais esprit, je le crains, ou alors je suis déjà blonde (voir plus loin).

J’ai gardé pour la bonne bouche le bien connu Yves Durand, ancien vice-président du groupe socialiste à l'Assemblée, co-rapporteur de la mission d'information parlementaire sur les rythmes scolaires au primaire et membre de la mission d'information parlementaire sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants ; il présidera  le dernier groupe de travail, « des personnels formés et reconnus », et tiendra donc sur les fonds baptismaux le nouveau bébé qui se substituera aux  IUFM comme  le Bitter San Pellegrino ® remplace le Campari ®.

 

Enfin, le fait que Bruno Julliard soit chargé de la concertation et de la préparation de la loi d'orientation est à lui seul susceptible de désespérer définitivement tout enseignant de terrain et de bonne volonté (zeugma). Comprenez-moi bien : je n’ai rien contre lui en tant que personne, mais comment prendre au sérieux un jeune homme qui n’a jamais vu d’élèves autrement qu’en photo, et qui, passé directement de la direction de l’UNEF à celle du PS, n’a à aucun moment mis un tant soit peu les mains dans le cambouis ?

 

Bref, tout ce dispositif technocratique ne laisse rien présager de bien positif. Le souvenir cuisant des consultations Prost et Meirieu, soigneusement bidouillées, est encore dans toutes les mémoires, et la Présidente, assez échaudée par les précédentes expériences pour se sentir aussi méfiante que le Sioux qui vient de naître, s’engage ici solennellement à se faire TEINDRE EN BLONDE PLATINE (ceux qui me connaissent imaginent aisément le résultat) s’il ressort de cette grrrrande concertation autre chose qu’une synthèse pour ainsi dire déjà rédigée et qui ressemblera comme deux gouttes d’eau à tout ce qui est proposé depuis des mois par les pédagogues socialistes et assimilés.

 

Alors, que faire ? « Un site internet est mis en place dès aujourd'hui afin que les citoyens à titre individuel (puissent) contribuer au débat », précise le ministère. De son côté, la FSU vient d'ouvrir un site destiné à accueillir les contributions,  http://www.desideespourleducation.net/

Rien ne nous/vous empêche d’y faire parvenir vos cogitations, ne serait-ce que pour rompre un tant soit peu avec ce qui ne devrait pas être une unanimité de façade. Il y a des moments où quelques fausses notes ne nuisent en rien à la beauté d’un ensemble, n'est-ce pas.

 

Parce que nous ne sommes pas des opposants systématiques, l’association Reconstruire l’Ecole ne demande qu’à être heureusement surprise, et applaudira tout ce qui ira dans le sens de ce qu’elle revendique depuis des années. Mais il faut avouer que cette Concertation, telle qu’elle semble s’organiser, ne laisse pas d’inquiéter quant à ce qui en sortira.

Puisse la montagne ne pas accoucher d’une méchante souris…

 

NB : Les membres conviés  :

http://www.refondonslecole.gouv.fr/wp-content/uploads/2012/07/les_premiers_membres_de_la_concertation.pdf

 

Et toujours, le site de RE, http://www.r-lecole.fr/

 



 

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29 juin 2012 5 29 /06 /juin /2012 17:45

 

 

 

 

 

 

Objet d’étude : l’épistolaire…


ou : lettre de Vincent Peillon et George Pau-Langevin à tous les personnels de l’éducation nationale

 

 

 

Le BOEN du 26 juin 2012 publie une longue lettre de Vincent Peillon et George Pau-Langevin à tous les personnels de l’éducation nationale : http://www.education.gouv.fr/cid60743/page.html


N’écoutant que son courage et nonobstant, pêle-mêle, sa fatigue de fin d’année, les quarante degrés à l’ombre sur les Bouches du Rhône et les sautes d’humeur de son ordinateur,  la présidente de RE, qui enseigne le français et les langues anciennes depuis 1977, entreprend donc, cherchant son énergie dans les talons,  d’effectuer le commentaire de ce texte, munie de tous les outils d’analyse à sa disposition et de son coutumier mauvais esprit.

 

Comme le sait tout candidat au bac (1), le discours épistolaire obéit à certaines caractéristiques qu’il est facile de repérer, en particulier un ensemble de conventions liées à des usages sociaux ou amicaux variables  --  de la lettre d’amour à la lettre de rupture en passant par la lettre administrative et autres -- , et une énonciation à la première personne portant la marque du destinateur. Rappelons également qu’une lettre est en général un texte construit, et que sa visée, argumentative ou autre, passe par la mise en place de stratégies rhétoriques de persuasion ou de séduction  cherchant à en faire une parole performative, c'est-à-dire qui soit en elle-même une action. C’est cette articulation entre la stratégie épistolaire et la performativité de l’écrit que nous nous proposerons ici d’étudier.

 

Une fois définie la problématique de notre commentaire (2), commençons donc, comme tous les bons élèves, par expliquer le titre. « Lettre à tous les personnels de l'éducation nationale » : c’est clair, direct, informatif et rassembleur. On notera le « tous », qui englobe enseignants et non-enseignants, de la maternelle à l’Université, unis dans la même grande famille de l’éducation nationale, où tout le monde s’aime ou du moins le devrait. Bref, ça commence plutôt bien.

 

Il nous faut également dire un mot de l’énonciation. La lettre se présente comme écrite  à quatre mains, par Vincent Peillon et George Pau-Langevin. Difficile exercice malgré quelques illustres précédents. Il faut une harmonie parfaite pour travailler ainsi, être frères, sœurs (les Scudéry, les Goncourt, les  Groult) ou amis proches (Erckmann-Chatrian, Boileau-Narcejac, Fruttero et Lucentini). Ici le tandem est d’autant plus intéressant qu’il unit un homme blanc et une femme antillaise, ce qui constitue un signe subliminal qui mérite commentaire. NOUS (Vincent + George, comme Sand de surcroît) VOUS (les personnels de l’éducation nationale) écrivons. Belle maîtrise des indices, et captatio benevolentiae d’autant plus efficace qu’elle est discrète. Normale, quoi.

 

Le texte proprement dit débute dans un registre politico-lyrique du meilleur aloi. On note par exemple « une certaine idée de la France, de la République et de l'humanité »  tressant avec une certaine habileté le motif gaullien et un rythme ternaire progressif qui fait son petit effet. On appréciera également le balancement fort bien conduit dans « l'objectif d'une refondation républicaine de l'École et d'une refondation de la République par l'École », qui emporte tout de suite  l’adhésion. De manière générale, tout l’exorde, dans le fond comme sur la forme, est convaincant : « laïcité », « refondation », « intégration », « progrès », « espérance », « justice », « ambition », « promotion », « justice sociale », « rétablir le respect », tous ces mots sont des baumes sur le cœur de l’enseignant meurtri par cinq ans de sarkozysme borné.

 

Pourtant, il en manque un, cruellement absent de l’ensemble du texte : le mot « instruction ». Et son absence fait sans doute plus sens que la présence de tous les autres. Un seul mot nous manque, et tout est compromis…

 

Car c’est ici que le destinataire doit commencer à se montrer vigilant. Après cette entrée en matière alléchante, que « tous les personnels », effectivement, ne peuvent que plébisciter, les détails, où se cache le diable, ont en effet de quoi susciter une légitime méfiance.

 

L’école primaire est qualifiée de « première priorité », et on peut alors lire  de prime abord, de belles intentions, en particulier concernant la scolarisation des tout-petits, la création de mille postes et « l’acquisition des savoirs fondamentaux ».

Cela dit, pour en revenir à la « première priorité », l’intention stylistique de ce polyptote pléonastique, malheureusement devenu, au fil des années, une tarte à la crème du jacassin politico-médiatique, se retourne contre ses auteurs. L’unité de ton avec l’exorde, hautement rhétorique, est dorénavant brisé par cette « première priorité » qui  fait retomber le soufflé républicain des premiers paragraphes. C’est à présent de pédagogie que l’on va parler, et pas forcément de la meilleure, comme l’indique le flou de la formulation selon laquelle elle doit « être attentive aux travaux de la recherche » : s’agirait-il, sans oser l’avouer pour ne vexer personne, tout en faisant plaisir à l’UNSA et au SGEN-CFDT,  de  renouer avec le constructivisme ? Il y a là un flou, et donc, comme disait la grand-mère de Martine Aubry, un loup -- armé de grandes dents : les sciences de l’éducation.

 

La suite de la lettre confirme les inquiétudes, et là plus de « nous », plus de « vous », plus de rythmes ternaires, mais un présent de l’indicatif à valeur injonctive : « le socle commun de connaissances et de compétences, inscrit dans la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005, est  le cadre de référence de la scolarité obligatoire », et « le livret personnel de compétences actuel est inutilement complexe » mais il sera maintenu une fois amendé. «  La mise en œuvre de la réforme du lycée se poursuit à la rentrée 2012 selon les dispositions arrêtées en 2010 », ce qui signifie en clair que la catastrophique réforme Descoings, qui a fait du lycée une usine à gaz en y organisant l’enseignement de l’ignorance, est pérennisée. Seule avancée, l’histoire et de la géographie sont rétablies en terminale scientifique. Aucun changement non plus en ce qui concerne les langues vivantes, en dépit de l’opposition de nombreux personnels, syndicats et associations de spécialistes, et pas de véritable engagement sur le dispositif Eclair, qui a pourtant montré toute son inutilité.

Le passage (obligé) sur le numérique et l’e-éducation laisse le lecteur dans une interrogation sans fond : comment peut-on décider si facilement de ce qui va engager l’Ecole pour les décennies à venir, sans poser à aucun moment la question de la neutralité du numérique, qui est, justement, beaucoup plus qu’un outil ?

 

A ce stade de la lecture, le destinataire se sent saisi d’accablement : socle commun, pédagogie, lycée Descoings... On garde tout, et parfois même on persévère dans l’erreur ! Où  est donc le changement promis ?

 

C’est alors que, selon une stratégie éprouvée, les deux scripteurs soufflent le chaud et le froid, et, avec quelques lignes assez rassurantes sur « l’autorité », la « sérénité » et la « sécurité », laissent entendre, avec la création de postes de CPE et d’AE,  leur volonté de rétablir, dans les établissements, « un climat favorable aux apprentissages ».

 

Mais le paragraphe suivant, très maladroit, détruit définitivement  ce fragile édifice. En choisissant de conclure sur la formation des maîtres, les auteurs ont cru garder le meilleur pour la fin, et boucler en apothéose leur message aux personnels. Hélas, trois fois hélas, les « écoles supérieures du professorat et de l'éducation qui seront opérationnelles dès 2013 (et où) tous les professeurs, quel que soit le niveau d'enseignement auquel ils se destinent, partageront un moment de formation commun » semblent nous ramener aux « bons vieux » IUFM  qui ont pourtant, dès le départ, fait preuve de leur nocivité – qu’on se souvienne du rapport Schwartz, soigneusement enterré en son temps pour cause de mal-pensance…

 

Quant à la péroraison, dont l’emploi des italiques souligne l’intention conclusive, il s’appuie sur une auctoritas, «  Le Président de la République »,   et rappelle « la priorité qu'il accord(e)  à l'École de la République ». Le registre lyrique-épique reprend ici ses droits ; mais comment comprendre « C'est une question de moyens, mais aussi de valeurs » ? QUELLES valeurs ? Celles de la République, me direz-vous, mais qui sont de facto démenties par le maintien du socle commun, la continuation du lycée Descoings, et le retour des IUFM…  N’est-ce pas une  manière de dire qu’il y aura à la fois peu de sous et beaucoup de sciences de l’éducation ?  

« Il convenait d'indiquer déjà qu'un changement a bien eu lieu » : lequel ? Si l’on excepte l’abrogation du  décret n° 2012-702 du 7 mai 2012 relatif à l'évaluation des personnels, rien de ce qui a été entrepris par la droite n’est véritablement remis en cause. En somme, dorénavant, tout sera comme avant. Tout se passe comme si le parti socialiste, prenant acte du sale boulot accompli par l’UMP ces dernières années (ou secrètement ravi de ne pas avoir à l’accomplir lui-même…), entendait s’en contenter en ne le retouchant qu’à la marge, et dans un sens qui ne peut nous convenir.

 

C’est pourquoi, à notre grand regret, nous ne pouvons conclure qu’en réaffirmant que nous n’avons pas été convaincus par cette lettre, qui dit pour ne pas faire, ou pour faire pire. Si la rhétorique en est parfois républicaine, le bilan performatif est plus que décevant, comme dans ces opéras où l'on chante "Marchons, marchons" en restant sur place : soit on n'agira pas, soit on persévérera dans l’erreur. La défiance sera donc de mise, mais aussi la vigilance. L’association Reconstruire l’Ecole est toute disposée à accueillir avec bienveillance tout ce qui ira dans le sens du devoir d’instruction publique auquel elle rappellera inlassablement les ministres… mais quelque chose dit à la présidente que nous allons vers « de rudes combats »…

 

Dernière minute et perplexité :

http://www.lexpress.fr/education/quatre-personnalites-pour-animer-la-grande-concertation-de-peillon_1132369.html

 

 

      Notes : 

 

(1)http://www.toutpourlebac.com/dossiers/156/bac-fiche-francais--lepistolaire--de-la-lettre-au-roman/426/les-caracteristiques-de-la-lettre.html

(2) Je suis scolaire, voilà ma gloire, mon espérance et mon soutien

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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 22:08

 

 

 

 

 

 

 

Avec le retour aux affaires du Parti Socialiste (nooooon, ce n’est pas une fine allusion à M. Guérini…) et la nomination sans surprise de Vincent Peillon à l’Education Nationale, on ne doit s’étonner ni de voir réapparaître au ministère quelques têtes connues comme  MM. Duwoye, Siné et Delahaye, (sans oublier, naturellement, M. Jean-Jacques Hazan, parent d’élève professionnel, et l’immarcescible Bruno Julliard), ni de réentendre des fadaises que cinq années de dékhonnage à droite-droite nous avaient quelque peu fait oublier.

 

Changer de gouvernement, serait-ce donc juste changer de bêtise, comme on dit changer d’air, de coiffure ou de chemise ?

 

On peut se le demander quand on entend le ministre, manifestement cornaqué de très près par le SGEN-CFDT, l’UNSA-FEN et la FCPE, annoncer à grands sons de trompe devant les parents d’élèves de la PEEP qu’il a l’intention de « faire évoluer la notation » , -- ce qui, ô surprise, a immédiatement été compris par tous les thuriféraires de l’élève au centre et du système finlandais, comme la fin pure et simple de la notation. Emporté par son élan, après avoir à plusieurs reprises souligné la grande souffrance des écoliers français, V. Peillon a affirmé au congrès de la FCPE vouloir être « le ministre des élèves ». C’est beau comme l’Antique.

 

Loin de moi l’idée de me lancer dans des jeux de mots fâcheux sur le lycée Papeillon, ni même d’entonner le grand air indigné du laxisme à l’école : si les moyennes désastreuses et les zéros pointés permettaient de faire progresser les potaches, cela se saurait. Il ne s’agit donc pas pour moi de défendre les notes pour le plaisir de défendre les notes, mais simplement d’essayer, si c’est possible, de poser les problèmes de manière sérieuse.

 

Qu’il ne soit pas agréable de « se prendre une taule » (une bulle, une caisse, une pêche, une moque…), surtout quand on a l’impression d’avoir sérieusement travaillé, personne ne le contestera. De là à parler d’enfants aussi traumatisés que les petits Japonais (qui, rappelons-le, en viennent parfois à se suicider tant ils sont sous pression), il y a tout de même un pas qu’il faut éviter de franchir sauf à oublier ce que parler veut  dire. Répétons-le , nos collègues sont des professionnels de l’enseignement, pas une bande de sadiques aigris qui se défoulent de leur mal-être existentiel en « sacquant » les chères têtes blondes, brunes et rousses. Tout se passe comme si, de fait, c’étaient surtout les parents qui étaient en souffrance – la fonction de géniteur d’apprenant suscitant, on peut le croire, une teneur en stress nettement supérieure à  la moyenne. Les surrénales, sans doute…

 

Donc, sérieusement : on va supprimer la notation, au moment précis où tous les défenseurs de l’évaluation se retrouvent aux manettes. Certes, il ne s’agira pas de l’évaluation de droite, qui, air connu,  n’est pas bonne, mais de celle de gauche -- celle qui, j’ignore par quel miracle, se trouvera soudain parée de toutes les vertus pédagogiques. L’évaluation, on le sait, est le maître-mot du « socle commun », dont le livret de compétences est dorénavant à remplir pour la première fois de manière nationale en troisième.

Rappelons à ceux qui ont loupé un épisode du feuilleton que ce livret est censé évaluer non seulement des compétences disciplinaires, mais aussi des « savoir-être », en clair des comportements, comme par exemple, dans les « compétences sociales et civiques », « mobiliser ses connaissances pour comprendre quelques questions liées à l’environnement et au développement durable et agir en conséquence » « prendre conscience des enjeux citoyens de l’usage de l’informatique et de l’internet », « s’impliquer dans un projet individuel ou collectif », « participer à un débat, à un échange verbal », connaître le « rôle de la défense nationale », « se familiariser avec l’environnement économique, les entreprises, les métiers de secteurs et de niveaux de qualification variés », « s’engager dans un projet individuel, s’intégrer et coopérer dans un projet collectif, manifester curiosité, créativité, motivation à travers des activités conduites ou reconnues par l’établissement, assumer des rôles, prendre des initiatives et des décisions », sans oublier les « attestations scolaires de sécurité routière », « « apprendre à porter secours » , et j’en passe.

Bref et si j’ai bien compris, pour valider tous ces items, l’élève Kevin Dugenou devra trier ses déchets, ne pas aller zyeuter des cochoncetés sur internet, participer au club Unesco, jouer le jeu du débat citoyennisant, saluer les couleurs, lire les cours de la Bourse, être délégué de classe, et traverser dans les clous : bref, le rejeton de la famille Ricoré, que dis-je, un véritable amour d’enfant, parfaitement conforme aux canons de la bien-pensance en cour !

 

Que l’on me permette de préférer la brave et honnête « composition », qui, par la notation,  n’évaluait QUE la capacité de l’élève, au moment M, d’accomplir la tâche T, qu’il s’agisse de l’accord du participe passé, de la règle de trois ou du pluriel des noms en –ou. L’évaluation par compétences, parfaitement intrusive, aurait dû, en bonne logique, horrifier des parents d’élèves pourtant si soucieux de l’épanouissement de leur géniale progéniture bien peignée. Manifestement, quelque chose leur a échappé – et je parie volontiers que dans quelques années, si ce type d’évaluation comportementale  se généralise dans tout ce qu’elle a de normatif, ces mêmes parents demanderont avec véhémence le rétablissement de la notation.

 

Alors, soyons encore sérieux cinq petites minutes : renoncer aux notes, c’est juste un gadget, qui a principalement l’avantage de ne pas coûter un sou. Au lieu de supprimer la notation, mesure aussi stupide qu’inutile, le ministre et son équipe s’honoreraient de remettre de l’Ecole à l’école, afin de venir en aide à tous ceux qui n’ont, justement, que l’Ecole pour apprendre.

 

V. Peillon n’a pas à être le ministre des élèves, ni le ministre des parents, ni le ministre des enseignants, ni même le ministre de l’éducation, mais le ministre de l’instruction publique, -- et c’est à ce DEVOIR D’INSTRUCTION PUBLIQUE que Reconstruire l’Ecole, opiniâtrement, obstinément  et sans rien lâcher, le rappellera.

 

 

 ... et toujours, le site de RECONSTRUIRE L'ECOLE, http://www.r-lecole.fr/

 

 

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28 mai 2012 1 28 /05 /mai /2012 16:15

 


 

 


 

 

 

      


Réunion-débat organisée par l’Institut de recherches de « Reconstruire l’école »

Samedi 2 juin, 14 h, lycée Henri IV, 23 rue Clovis, 75005 Paris

 

 

On célèbre en juin 2012 le centenaire de la naissance d’Alan Turing. Bien avant l’apparition des premiers ordinateurs, Turing donna son nom à une « machine abstraite » qui constitue le fondement de l’informatique et de l’ensemble de ses développements actuels. C’est pourquoi l’Institut de recherches de « Reconstruire l’école » (I.R.R.E.) a choisi pour sa première manifestation publique – son acte de naissance en quelque sorte – de commémorer à sa manière l’œuvre de ce mathématicien de génie qui fut aussi un « suicidé de la société ». Au cours de la réunion-débat intitulée « L’école est-elle une machine de Turing ? », nous essaierons d’aborder les principaux problèmes que pose l’interférence entre les pratiques d’enseignement et celles qui dérivent, directement ou indirectement, de l’informatique. Car les TICE ne sont pas seulement un « outil », relativement neutre, comme put l’être en son temps la « télévision scolaire » : l’introduction de l’informatique à l’école implique la décomposition des savoirs disciplinaires et leur réorganisation en « compétences évaluables » ; elle implique donc aussi tout ce qui relève d’une « culture de l’évaluation », qu’il s’agisse des élèves ou des professeurs ; elle a enfin des conséquences sociales, politiques et philosophiques qui dépassent le cadre strictement scolaire et contribuent à la genèse d’un monde nouveau dont on peut se demander s’il est vraiment souhaitable mais auquel on veut adapter dès la première enfance l’ensemble des futurs citoyens.

 

Programme

 

Jean-Pierre Weill, Inspecteur Général des Lettres : « Culture de l'évaluation : une contradiction dans les termes? »

La prétendue culture de l'évaluation masque la nécessité de toute évaluation et ruine à force de normes épanouissement et création. Il y a lieu de s'interroger, surtout dans l'enseignement sur les conditions d'un équilibre entre un regard objectif et la liberté du professeur et des élèves.

 

Florent Gouget, professeur de Lettres : « Contre l'Ecole numérique »

A l'heure où l'équipement numérique de l'école fait consensus au niveau politique et syndical, toutes les critiques se résumant à celles des moyens attribués, Florent Gouget invite à voir dans l'invasion numérique une attaque contre le cœur de ce qu'est, ou devrait être, l'enseignement.

 

Pedro Cordoba, maître de conférences honoraire : « Le didacticien, l'autiste et l'excellisation des savoirs »

A la (ré)éducation des malades par les thérapies comportementalo-cognitivistes fait écho le traitement des élèves par les sciences de l’éducation. Réflexion sur ce curieux chassé-croisé entre l’école et l’hôpital.

 

 

 

   

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 17:46
Anaphores

 

 

 

 

 

Sarkozy, c’est fini : une défaite amplement méritée, et vécue par tous ceux qui y ont un tant soit peu contribué, ne serait-ce que par leur vote, comme un véritable soulagement.  

 

A l’occasion du débat qui opposa voici quelques jours les deux finalistes, la gent journalistique découvrit, émerveillée ébahie ravie, l’existence de l’ANAPHORE http://www.rue89.com/rue89-presidentielle/2012/05/03/moi-president-de-la-republique-letrange-anaphore-de-hollande-231816, stupéfaction indiquant bien, soit dit en passant, que le niveau ne monte pas plus à l’ISFJ que chez le lycéen lambda…

 

La présidente de Reconstruire l’Ecole, n’écoutant que sa présomption et conjoncturellement revigorée par la victoire du candidat socialiste, n’hésitera donc pas une seule seconde avant de se lancer elle aussi dans le jeu de l’anaphore.

 

Si François Hollande, Président de la République, ne restitue pas à l‘Education nationale, comme il s’y est engagé, les postes dont elle a besoin, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne revient pas, comme il s’y est engagé, sur le décret n° 2012-702 du 7 mai 2012 confiant aux chefs d’établissement l’évaluation des enseignants, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne redonne pas leur valeur aux concours du CAPES – et d’abord en supprimant la honteuse épreuve de servilité dite « agir en fonctionnaire de l’Etat » --, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne rétablit pas l’année de stage des néo-titulaires, il nous trouvera résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, sous prétexte de réimpulser la recherche en pédagogie, se contente de ressusciter le fonctionnement monocolore des IUFM en y consacrant l’hégémonie du constructivisme et des pseudo-sciences de l’éducation, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne revient pas sur la scandaleuse réforme de la licence, qui a fait de l’examen un parchemin sans valeur ni contenu, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, n’abroge pas la LRU et le décret n° 2009-460 du 23 avril 2009 réformant le statut des enseignants-chercheurs, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, n’entreprend pas de limiter les effets délétères de la mastérisation, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne rétablit pas le caractère national du « mouvement » (pour les non-initiés, des affectations et mutations), il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, sous couvert de favoriser l’expérimentation dans les établissements et d’assouplir leur fonctionnement, renonce aux examens, concours et programmes nationaux, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, n’abroge pas la désastreuse réforme Descoings, qui a fait du lycée une usine à gaz, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, porte atteinte, sous prétexte d’ouverture sociale, aux CPGE, (seules niches préservées dans le post-bac avec les BTS et les IUT), il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, n'organise pas un débat pluraliste sur les programmes, tout d’abord ceux du primaire, et ne rappelle pas fermement l’impérieuse nécessité, pour tous les enfants qui n’ont que l’Ecole pour apprendre, de savoir lire, écrire, compter et calculer, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, n’envisage pas de revenir sur le « socle commun », ce smic culturel qui méprise l’intelligence des élèves, et d’abolir les « livrets de compétence » à remplir cette année pour la première fois de manière nationale en troisième, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne reconnaît pas l’importance d’une revalorisation des séries littéraires, tout particulièrement pour ce qui concerne les langues anciennes, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, entreprend en quelque manière de toucher aux statuts des enseignants, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, envisage, au nom d’une hypothétique pacification scolaire, de faire la moindre fleur à l’enseignement privé, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne revient pas sur les accords de Latran en rétablissant le monopole de la collation des grades, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne revient pas sur les avantages fiscaux dont bénéficient les structures (privées) de soutien scolaire ou les officines comme la « Fondation pour l’Ecole », il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne donne pas aux enseignants les moyens de faire leur travail sans être harcelés par leur hiérarchie et/ou les parents d’élèves, dont la marge d’intervention au sein des établissements mérite d’être clarifiée, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

Si François Hollande, Président de la République, ne prend pas des mesures susceptibles de protéger nos collègues des violences physiques, pressions psychologiques et autres calomnies s’étalant sur les divers réseaux sociaux, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

 

Nous n’ignorons pas que le programme socialiste pour l’Ecole est largement inspiré des thèses de l’UNSA-FEN et du lobby provisoral « Education et devenir », avec une touche de SGEN-CFDT en renfort de potage. Si François Hollande, président de la République, ne se montre pas assez pragmatique pour comprendre que ces sensibilités sont minoritaires dans le corps enseignant, il nous trouvera, résolus, sur son chemin.

 

Notre intense satisfaction de voir messieurs Chatel et Sarkozy coiffés du bonnet d’âne et relégués au coin après avoir reçu un sérieux coup de règle sur les doigts ne signifie pas pour autant que nous accordons des bons points a priori à François Hollande, Président de la République.

Car nous avons de la mémoire.

Nous nous souvenons d’Allègre, de sa violence haineuse, de sa morgue, de son mépris.

Nous nous souvenons de Meirieu, de sa « consultation des lycéens » si scandaleusement démagogique, et des dérives que celle-ci entraîna en termes de déréglementation de l'école et d'instauration d'enseignements sans contenu ni programme, comme les TPE et l'ECJS.

Nous nous souvenons de Mme Royal proposant, devant un parterre ricanant de proviseurs et de principaux épanouis par leur propre audace, de porter à 35 heures le service hebdomadaire des professeurs de collège et de lycée.

 

R.E., comme le collectif Sauver Les Lettres et quelques autres associations de défense de l’Ecole et des humanités, naquit des « comités anti-Allègre », et peut repartir au combat « avec sous les talons les côtes de Rossinante, et sur les grands chemins le bouclier au bras ».

C’est pourquoi, à présent que François Hollande est élu Président de la République, nous resterons en permanence critiques et vigilants, afin de le rappeler au devoir d’instruction publique. Résolus.

 

 

 

Et toujours, le site de "Reconstruire l'Ecole" : http://www.r-lecole.fr/

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23 avril 2012 1 23 /04 /avril /2012 17:54

 

 

 

 

 

 

Ils ont voté, et puis ça y est….

Dimanche soir à  vingt heures, pour tout dire, le premier sentiment fut la honte pour mon pays, celle de voir Mme Le Pen, parée des oripeaux de la laïcité, de l’anti-système et de la souffrance populaire, porter le score de son parti à un niveau historique. Tant de cours d’ECJS pour en arriver là, ce serait risible si ce n’était pas tragique. Quel immense échec de ce catéchisme citoyennisant !

Le second fut la déception : les deux candidats qui portaient le moins mal les espérances des défenseurs de l’Ecole et des humanités n’ont pas atteint, tant s’en faut, les pourcentages espérés.

 

Reste à présent à choisir entre MM .Sarkozy et Hollande.

Le premier, en cinq ans de mandat, n’a  tenu aucune de ses promesses prétendument « républicaines » pour réintroduire de l’instruction à l’Ecole :  suppressions massives de postes, calamiteuse mastérisation, sabotage des concours de recrutement, envoi au casse-g…. des néo-certifiés ou néo-PLP, une intégration des IUFM à l’Université qui n’a jamais remis en cause la suprématie des pseudo-sciences de l’éducation, la licence bradée, les lycées transformés en usines à gaz grâce à la calamiteuse réforme Descoings, dont on ne dira rien par égards à la mémoire du défunt… Le bilan  du président-candidat est accablant et ne peut en aucun cas être défendu.

En ce qui concerne M. Hollande, nous ne  nous faisons guère d’illusions sur les propositions de son équipe en matière d’éducation. Avides de retrouver les places qu’ils n’ont jamais véritablement perdues, ses amis pédagonigologistes, nous le savons, piaffent d’ores et déjà dans les starting-blocks, si je puis oser cette métaphore hardie. 

Certes, et c’est évidemment positif, le candidat socialiste s’est engagé à restituer les soixante mille postes supprimés.  Il ne sera certainement pas celui qui ricanera maintes fois en public sur La Princesse de Clèves. Pour le reste – mais nous ne demandons qu’à être heureusement surpris, naturellement – rien de très emballant (euphémisme). Par conséquent, bien sûr, à supposer (ce qui demeure de l'ordre du probable) que les mesures prises par le futur ministre socialiste de l'Education s'avèrent nocives, Reconstruire l'Ecole prendra toute sa place pour s'y opposer résolument. Mais dans l'immédiat, c'est à celles de M. Chatel, franchement détestables,  que nous sommes, depuis des années, confrontés, avec les désastreux résultats que l'on sait. 

 

Est-ce à dire que la Présidente de Reconstruire  l’Ecole, renonçant à prendre ses responsabilités,  vous engage à aller taquiner le goujon le jour du second tour ? En aucun cas .

Comme on l’a remarqué dans le précédent article,  les deux finalistes étant, pour des raisons différentes, également déficients en matière de refondation de l’Ecole et de défense des humanités, il faudra  raisonner autrement qu’en termes de lobbying et se prononcer en fonction d’autres critères : c’est à dire se demander seulement, dans le secret de sa conscience et de son isoloir, lequel des deux impétrants à la fonction suprême mettra le moins à mal notre système français issu du programme de la Résistance et saura se montrer enfin à la hauteur de la fonction… 

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